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Communication Dans Un Congrès Année : 2021

"Préférer être seule" : comment comprendre une résistance à la norme conjugale en contexte d’immigration en France ?

Nadia Mounchit
  • Fonction : Auteur
  • PersonId : 1043195

Résumé

Si en émigrant on emmène avec soi les manières de faire famille qui organisent alors la sphère privée, l’installation en pays d’immigration pose la question de leur reformulation. Elle se pose particulièrement pour celles et ceux qui partent de pays d’Afrique de l’Ouest et centrale, les diverses sociétés de départ se caractérisant par des normes familiales se distinguant nettement de celles qui prévalent en France (rôle des collatéraux dans l’éducation de l’enfant, ancrage lignager, ou encore l’existence d’un régime d’union polygamique). Parmi les traits sociodémographiques relevés au sein de l’Afrique de l’Ouest et centrale, les taux de célibat définitif sont faibles et particulièrement, dans les pays où la polygamie est marquée, le remariage des femmes après rupture d’union (divorce, veuvage) est rapide et fréquent (Marcoux & Antoine, 2014 ; Hertrich, 2006). Cette communication cherchera à interroger le rapport au célibat (autrement dit, la vie hors couple) d’émigrantes d’Afrique de l’Ouest et centrale installées en France où, si les modèles familiaux divergent d’avec les pays de départ, y est retrouvée une norme conjugale forte (Bergström, Courtel et Vivier, 2019). Au sein d’un corpus de quarante-et-un entretiens biographiques conduits avec des émigrantes installées en France depuis au moins dix années, il apparaît qu’un peu plus d’un tiers d’entre elles n’est pas en couple au moment de l’enquête. Et au sein de ce tiers de femmes, on en trouve un certain nombre qui affirment ne pas souhaiter se réengager dans une relation et préférer « être seule ». Comment lire cette préférence exprimée à contre-courant de la norme conjugale et réaffirmée en dépit, pour certaines d’entre elles, des sollicitations de l’entourage à une (re)mise en couple ? Nous verrons que pour ces femmes âgées de 50 ans et au-delà, leur posture est à replacer dans un cycle de vie et dans le cadre d’un « héritage conjugal » donné (relations conjugales vécues et leurs insatisfactions). Elle est également à comprendre à la lumière de l’indépendance financière qui est la leur et, pour certaines d’entre elles en particulier, par un investissement dans des espaces sociaux en-dehors de la sphère conjugale où des supports relationnels sont trouvés. Surtout, la préférence à être seule exprimée renvoie à des espaces d’autonomie plus dégagés et que le couple risquerait ainsi d’entamer. Elle résonne alors comme l’une des expressions d’un processus d’individuation qui, s’il n’est pas linéaire, est renforcé par l’expérience migratoire et concourt à un changement du rapport aux normes familiales.

Domaines

Sociologie
Fichier non déposé

Dates et versions

hal-03793749 , version 1 (01-10-2022)

Identifiants

  • HAL Id : hal-03793749 , version 1

Citer

Nadia Mounchit. "Préférer être seule" : comment comprendre une résistance à la norme conjugale en contexte d’immigration en France ?. 9ème Congrès de l'Association Française de Sociologie (AFS), Jul 2021, à distance, France. ⟨hal-03793749⟩
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