Le Narrenschiff de Sébastien Brant à l’épreuve du filtre foucaldien
Résumé
Pour illustrer sa thèse historico-philosophique du partage entre une expérience cosmique et une expérience critique de la folie à l’aube de l’âge moderne, Michel Foucault mobilise au tout début de l’Histoire de la folie un ouvrage jusque là peu connu du grand public : le Narrenschiff de Sébastien Brant. La manière dont Foucault se réfère à ce texte, ainsi que la lecture qu’il en propose sont à plusieurs égards problématiques. En passant au peigne fin, une à une, les affirmations de Foucault sur le Narrenschiff, cet article rend compte du hiatus qui se dessine dans l’Histoire de la folie entre les sources convoquées et les thèses avancées. En effet, au lieu de s’appuyer sur ce chef-d’œuvre de la Renaissance allemande, Foucault s’en inspire pour la création de sa propre Nef des fous, une sorte d’emblème qui fixe dans une image l’expérience renaissante de la folie.