Textes augmentés et discours numériques Pour une approche logométrique des digital corpora
Résumé
La distinction texte / discours tient beaucoup à la réification, matérialisation, naturalisation du premier et à l’idéalisation, dématérialisation ou artificialisation du second. C’est parce que le texte a pu être réduit à son support matériel (sinon naturel) telle la page papier, lorsque le discours semblait nous renvoyer, lui, à l’évanescence de ses conditions idéologiques ou culturelles de production, qu’une dichotomisation sans doute utile mais caricaturale a pu parfois s’exprimer.
Aujourd’hui, si le numérique représente un risque épistémologique évident dans les sciences du texte (néo-scientisme et technologisation du sens que certaines approches Talistes représentent bien), il constitue avant tout une révolution heureuse dont une des conséquences est la redéfinition des rapports texte/discours.
Cette contribution entend discuter l’herméneutique matérielle numérique qui se déploie actuellement dans le cadre des digitales humanités : celle-ci pose, par-delà les textes et les discours, les corpus textuels numériques comme des objets heuristiques et herméneutiques : parce qu’ils se présentent comme des architextes, et donnent corps à une notion aussi difficile que l’intertextualité, les (grands) corpus numériques organisent et performent des parcours interprétatifs, reconsidèrent la notion de textualité, complémentent nos actes de lecture dominés jusqu’ici avant tout par la linéarité scripturale du texte. En deux interrogations : les textes augmentés seraient-il aujourd’hui devenus des discours ? Et les corpus textuels numériques, grâce aux vertus concrètes de l’hypertextualité, intégreraient-ils le contexte dans le texte ?
Le propos théorique sera illustré sur le corpus des interventions télévisées des présidents de la République française de 1958 à 2015 et grâce à l’outillage logométrique (mesure du discours) ou textométrique (mesure du texte) implémenté dans le logiciel Hyperbase (10.0 – 2015).