Le Mésolithique à trapèzes et la néolithisation de l'Europe sud-occidentale - Archive ouverte HAL Accéder directement au contenu
Communication Dans Un Congrès Année : 2014

Le Mésolithique à trapèzes et la néolithisation de l'Europe sud-occidentale

Résumé

It is actually acknowledged that the neolithization of the Western Basin of the Mediterranean results from processes based on complex modalities, combining - in the context of a large progression with an east-west trend - migrations and acculturation scenarios between human groups distinct from a social and economical point of view. Within only a few millennia the last groups of hunter-gatherers disappear from the entire Mediterranean Basin and food producing economy definitely establishes itself. From the Near East where this neolithic economy develops at the turning point between the 10th and the 9th millennium, it reaches the Atlantic coast in the course of the 5th millennium before the Current Era. On of the main topics of the current research is thus to define the modalities according to which this change occurred and to determine the possible interactions between these two worlds. This question particularly finds an echo in the Western Mediterranean Basin. As a matter of fact, during the 7th millennium, a specific phenomenon emerges in this area, mainly perceivable in the chipped stone industries. This phenomenon will expand across the whole of North Africa and Western Europe. Up to then the mesolithic hunters manufactured small points shaped by abrupt retouch at the expense of narrow bladelets produced by percussion, and assembled on the arrow shafts to build composite projectiles. Later, the lithic assemblages show a complete change of the operative schemes which occurs quite suddenly with arrows featuring only one point at the end of the shaft from then on. These points are currently trapeze-shaped and obtained by truncation of a large blade using the microburin technique. The large blades themselves are produced by pressure technique or indirect percussion. This widespread phenomenon, identified from the mid-20th century onwards was globalised by J.G.D. Clark under the term " blade and trapeze industries ", which he interpreted as a kind of pre-neolithic colonisation of Europe. Several cultural entities have been defined since, for example the Upper Capsian in North Africa or the Castelnovian in Italy or France. Though it has to be discussed whether this phenomenon is consistent on a regional scale, the question of its origin as well as the modalities and routes of diffusion also have to be defined. A series of recent collective and European research programs have provided new insights to all these questions. Despite the deficiency of recent and reliable data, several aspects indicate that the origin of this phenomenon may be located in North Africa somewhere in the first half of the 7th millennium. The earliest reliable record in the Mediterranean Basin stems from Sicily dated at about 6600 before the Current Era. The industries exhibit the production of large blades by pressure at the expense of small flint pebbles with faceted striking platforms. These blades then serve as supports for the production of small, trapeze-shaped geometrics. Rapidly, the entire Italian Peninsula, the Adriatic, followed by Southern France and perhaps Mediterranean Spain will be witness to the distribution of these operative schemes. It is likely that a period of re-arrangement of the technical systems occurred later in that the global pattern (trapezes on large blades) undergoes a rapid spread towards Northern Europe while the use of pressure technique seems to subside and is finally restricted to the initial mediterranean phenomenon. The critical analysis of all the available radiocarbon dates as well as new measurements performed on distinct key sites have permitted a better understanding of the pace of diffusion of this phenomenon. In parallel, the revision of technological and typological analyses of several assemblages of the concerned sites allows to document the variability of the used operative schemes, a central aspect to define its internal structure. Nevertheless, the Mesolithic populations subsequently will rapidly be outshined by the impact of neolithization. Yet again, this is not a uniform phenomenon at the European scale and regional variability shown by the technical systems of the lithic assemblages of the first Neolithic populations may mirror processes of acculturation, at least of interactions between the last hunters and the first farmers. This is the case in Italy where the lithic assemblages of the Early Neolithic Impressed Ware show only few differences to those assigned to the Castelnovian. On the contrary, in Southern France and in Spain, the links between these two worlds generally seem to be weaker. In addition, at the current state of research, the precise analysis of the available radiocarbon data for both the last mesolithic sites and the earliest neolithic sites demonstrates that possible contacts could only occur in some very restricted areas.
Il est aujourd'hui acquis que la néolithisation du bassin occidental de la Méditerranée résulte de processus aux modalités complexes, mêlant déplacements physiques et scénarios d'acculturations entre groupes humains socio-économiquement distincts, au sein d'un grand mouvement d'est en ouest. En à peine quelques millénaires, l'ensemble du Bassin méditerranéen voit la disparition des derniers groupes de chasseurs collecteurs et l'avènement inéluctable de l'économie de production. Née au Proche-Orient au tournant des Xe et IXe millénaires, cette économie néolithique atteindra les rives de l'Atlantique dans le courant du Ve millénaire avant notre ère. L'un des enjeux majeurs de la recherche actuelle est donc de saisir les modalités selon lesquelles ce basculement s'est déroulé et de définir les interactions éventuelles entre ces deux mondes. Cette question trouve une résonance particulière dans le Bassin occidental de la Méditerranée. Là, dans le courant du VIIe millénaire, on assiste en effet à l'émergence d'un phénomène spécifique, essentiellement sensible au sein des industries lithiques taillées, qui va se répandre en quelques siècles à l'ensemble de l'Afrique du Nord et de l'isthme européen. Jusque-là, les groupes de chasseurs mésolithiques façonnaient de petites armatures à bords abruptes, aux dépens de lamelles étroites produites par percussion, et combinées entre elles sur les fûts des flèches pour former des projectiles composites. Puis, de façon relativement soudaine, les industries lithiques montrent un basculement complet des schémas opératoires avec des flèches dorénavant armées en bout d'une unique armature, de forme généralement trapézoïdale, obtenue par fracturation selon la technique du microburin d'une lame large, produite elle-même par pression ou percussion indirecte. Identifié dès le milieu du siècle dernier, ce vaste phénomène fut globalisé par J.G.D. Clarck sous le vocable de " blades and trapezes industries ", qui voyait en lui une sorte de colonisation prénéolithique de l'Europe. Depuis, plusieurs entités culturelles ont pu y être définies, tels le Capsien supérieur en Afrique du Nord ou le Castelnovien, en Italie et en France. Si la cohérence interne de ce phénomène doit être discutée régionalement, la question de son origine tout comme celle des modalités et des voies de diffusion doivent l'être également. Plusieurs programmes de recherche collectifs et européens ont apporté récemment de nouveaux éléments sur toutes ces questions. Malgré une certaine déficience de données récentes et fiables, plusieurs indices convergent pour suggérer que l'origine de ce phénomène serait à rechercher en Afrique du Nord, quelque part dans la première moitié du VIIe millénaire. Les attestations fiables les plus anciennes, à l'échelle du Bassin méditerranéen, se placent en Sicile aux alentours de 6600 avant notre ère. Les industries montrent alors une production de lames larges par pression, aux dépens de petits galets de silex à plans de frappe facettés, lames qui servent ensuite de supports à de petits géométriques de forme trapézoïdale. Rapidement, l'ensemble de la Péninsule italienne, l'Adriatique, puis le sud de la France et peut-être l'Espagne méditerranéenne vont montrer la diffusion de ces schémas opératoires. Il est probable qu'a lieu ensuite un temps de recomposition des systèmes techniques, puisque si le schéma global (trapèzes sur lames larges) poursuit un rapide mouvement de diffusion en direction du nord de l'Europe, l'usage de la pression semble se perdre pour ne rester au final que l'expression du phénomène initial méditerranéen. L'analyse critique de toutes les datations radiocarbone disponible, ainsi que la réalisation de nouvelles mesures sur des sites clefs nous a permis de mieux appréhender le rythme de la diffusion de ce phénomène. La reprise d'analyses technologiques et typologiques de plusieurs des gisements concernés permet également de documenter la variabilité des schémas opératoires mobilisés, élément clef pour saisir la structure interne de ce phénomène. Les populations mésolithiques seront toutefois ensuite rapidement oblitérées sous l'impact des processus de néolithisation. Mais là encore, il ne s'agit pas d'un phénomène uniforme à l'échelle de l'Europe, et les variabilités régionales exprimées dans les systèmes techniques lithiques des premières populations néolithiques peuvent être l'écho de processus d'acculturation, tout au moins d'interactions entre derniers chasseurs et premiers paysans. C'est ainsi le cas en Italie, où les industries lithiques du Néolithique ancien Impressa ne montrent que peu de différence d'avec celles du Castelnovien. À l'inverse, en France méridionale comme en Espagne, les liens entre ces deux mondes semblent plus distendus de façon générale. L'analyse détaillée des datations disponibles tant pour les derniers gisements mésolithiques que pour les plus anciens sites néolithiques montre d'ailleurs que les contacts éventuels n'ont pu avoir lieu, en l'état actuel des données, que dans quelques zones très délimitées.
Fichier non déposé

Dates et versions

hal-01009471 , version 1 (18-06-2014)

Identifiants

  • HAL Id : hal-01009471 , version 1

Citer

Thomas Perrin, Didier Binder. Le Mésolithique à trapèzes et la néolithisation de l'Europe sud-occidentale. La transition néolithique en Méditerranée. Actes du colloque Transitions en Méditerranée, ou comment des chasseurs devinrent agriculteurs, Muséum de Toulouse, Apr 2011, Toulouse, France. pp.271-281. ⟨hal-01009471⟩
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