Faire du sexe, faire le genre : scripts pénétratifs et transitions masculines en milieu homosexuel
Résumé
Cette communication a pour ambition d’étudier le rôle joué par les réécritures des scripts sexuels pénétratifs (Gagnon, 1990) dans la production de masculinités non hétérosexuelles inégalement subordonnées et marginalisées (Connell, 1995). Elle s’appuie sur une vingtaine d’entretiens réalisés auprès d’hommes cis homosexuels et de personnes transmasculines ayant relationné et/ou relationnant avec des hommes cis, et portant sur leurs pratiques sexuelles et choix de partenaires. Partant du constat du caractère structurant des pratiques pénétratives (respectivement vaginales et anales) dans la construction de l’hétérosexualité (cis)féminine et de l’homosexualité (cis)masculine (Sáez et Carrascosa, 2011), on montre que déplacer et réécrire les scripts pénétratifs lors des interactions sexuelles constitue une « pratique de genre » (Trachman, 2018) par laquelle les personnes transmasculines se positionnent à distance de la féminité hétérosexuelle, au sein de l’espace hiérarchisé des masculinités. Le succès de ce travail réflexif de production du genre implique néanmoins la collaboration des partenaires prenant part aux interactions sexuelles (West et Zimmerman, 1987). On étudiera donc les injonctions – parfois violentes – à la pénétration insertive ou réceptive exercées par ces derniers sur les corps transmasculins. Par les (ré)assignations genrées et raciales qu’elles charrient, elles font des rapports sexuels un lieu de co-production de masculinités non hétérosexuelles différenciées et hiérarchisées selon des critères de transitude et de racialisation.