Mémoire et sensations, ou "l'enfance retrouvée à volonté" (Mémoires d'outre-tombe, livres I-III)
Résumé
Les trois premiers livres des Mémoires d’outre-tombe, consacrés à l’enfance, marquent un moment fondateur dans la poétique du souvenir. Proust ne s’y est pas trompé, désignant la grive de Montboissier comme un modèle exemplaire de la mémoire involontaire. Dans ces pages, Chateaubriand donne un rôle primordial aux sensations fugitives ; revisitant magistralement le modèle du premier livre des Confessions de Rousseau, il fait de l’enfance non simplement une période de vie avec ses anecdotes obligées, mais le lieu d’une attention exacerbée au monde sensible. « L’enfant voit tout en nouveauté », écrira Baudelaire quelques années plus tard, voyant dans la capacité de l’enfant à absorber formes et couleurs l’essence même de l’inspiration. C’est sous cet éclairage résolument baudelairien qu’on interprètera ces trois livres comme un espace où retrouver la conscience primitive et sauvage de l’enfance.