« De l’étude à la valorisation : les châteaux d’Allinges et le projet AVER – des montagnes de châteaux. Ou l’apport des techniciens dans la représentation des châteaux en ruines »
Résumé
Le nord de la province historique de la Savoie possède une histoire médiévale et moderne riche qui nous a légué un patrimoine fortifié relativement pauvre bien que densément représenté au Moyen Âge. Il s’est en effet trouvé progressivement dévasté par les conflits successifs, ce qui a sans nul doute contribué à la construction d’une image actuelle de la Savoie plus renommée pour son patrimoine naturel que pour son patrimoine culturel.
Les châteaux de Château-Neuf et Château-Vieux d’Allinges (Haute-Savoie), situés à un peu moins de 5 km au sud de Thonon-les-Bains sur la rive méridionale du lac Léman, sont dans un état de ruine avancée. Propriétés de la commune d’Allinges depuis 2001, ils forment des objets patrimoniaux remarquables et importants mais leur gestion n’est pas sans impliquer de sérieuses contraintes en termes d’entretien, de conservation et de sécurité, alors qu’une multitude de publics leur est attachée.
En effet les motivations de ces fréquentations sont nombreuses et à la fois héritées de son histoire mais aussi résultant de nouveaux positionnements institutionnels qui ont récemment abouti à l’intégration du site dans un projet européen. Intitulé AVER (Anciens Vestiges En Ruine) – des montagnes de châteaux, et rattaché au programme ALCOTRA, il est piloté par la Région Autonome de la Vallée d’Aoste (Italie). Il associe par ailleurs les communes de Brusson et de Saint-Marcel pour le versant italien et, pour le versant français, le Conseil général de la Haute-Savoie, la Communauté de Communes des Collines du Léman et la Commune d’Allinges. Ce projet de trois ans (2010-2012) vise à développer une méthodologie de travail allant de l’étude à la valorisation des châteaux médiévaux et, en particulier, des sites en ruine. Outre les réflexions engagées sur les méthodes, et une action d’inventaire des sites castraux des territoires concernés, ce projet retient des sites pilotes en France et en Italie, voulus comme des lieux d’expérimentation.
L’étude du cas de Château-Neuf et de Château-Vieux vient témoigner de l’évolution des représentations des châteaux médiévaux à travers les siècles, successivement lieux de pouvoirs dominants puis déchus, ensuite ruines romantiques avant d’accéder au statut d’objets patrimoniaux. Le développement des recherches scientifiques et la réinterprétation des vestiges à la lumière des études archéologiques et de leurs médiations permettent un renouvellement des représentations, tant graphiques que mentales, de ces châteaux. Plus encore, elles appuient la réappropriation des sites par les acteurs locaux en fournissant des éléments tangibles utilisables aussi bien dans le cadre des restaurations que de la mise en valeur des sites.