Reductio Orientis ? De l’étrange au familier dans les récits de pèlerinage occidentaux en Terre sainte (XIIe-XIVe siècle) - Archive ouverte HAL Accéder directement au contenu
Chapitre D'ouvrage Année : 2019

Reductio Orientis ? De l’étrange au familier dans les récits de pèlerinage occidentaux en Terre sainte (XIIe-XIVe siècle)

Camille Rouxpetel
  • Fonction : Auteur
  • PersonId : 1039489
Albrecht Burkardt
  • Fonction : Auteur

Résumé

Cet article se propose d’étudier les récits de pèlerinage comme médiateurs en soi de la « réduction de l’inconnu », et aussi d’identifier les stratégies suivies par leurs auteurs pour réduire cet inconnu.

La Syrie, la Palestine et l’Égypte constituent pour les pèlerins latins un espace à la fois familier – la Terre sainte – et dépaysant – l’Orient, dont la double caractéristique influence le discours sur les chrétiens orientaux. Si le récit de la rencontre met en lumière ce qui s’écarte de l’univers familier de l’auteur, conduisant souvent à une condamnation et parfois à un décentrement du regard et à une démarche réflexive sur les fondements de son identité, il permet également de réduire l’écart entre ces deux sphères en rendant proche et familier ce qui était éloigné et étranger.

La mention de détails concrets caractérisant l’apparence ou le mode de vie des chrétiens de Terre sainte se situe ainsi à la croisée de la découverte d’une nouveauté porteuse d’exotisme et de la volonté d’identifier, selon des critères préétablis, des groupes et des individus. Dans ce dernier cas, l’insolite est relevé de manière à être compris du lecteur, demeuré en Occident, et est intégré à une sphère plus familière. Il est en quelque sorte domestiqué. Dans ce contexte, l’utilisation de comparaisons, de métaphores et de périphrases est l’une des modalités de l’incorporation du dissemblable à la culture latine. Les pèlerins rapportent ce qu’ils voient et ce qu’ils entendent à un système de représentations occidentales, à des éléments issus de la culture savante ou à l’environnement qui était le leur avant leur départ.

Trois exemples permettent de saisir plus particulièrement cette entreprise de « réduction de l’inconnu » dans les récits de pèlerinage. La description et l’interprétation du turban et de la ceinture portés par les chrétiens orientaux, notamment en Égypte, révèlent d’une part la difficulté pour les pèlerins à appréhender une réalité proprement orientale et inconnue en Occident et montrent d’autre part l’usage des récits antérieurs par les pèlerins, pour appréhender et décrire une telle réalité. Ensuite, l’apparition et la traduction de termes issus ou transcrits de la langue arabe indiquent l’intérêt croissant des pèlerins pour leur environnement humain, pèlerins qui font alors œuvre de traducteurs en mettant en contact deux systèmes linguistiques et contribuent à la circulation de termes arabes au sein de leur langue, latine ou vernaculaire. Enfin, l’évocation de la liturgie et des croyances des chrétiens d’Orient à l’aune de celles des chrétiens d’Occident, témoigne plus d’unevolonté de rendre familier ce qui est différent et de trouver des points de repères dans une terre lointaine source d’étrangeté, que d’un œcuménisme avant l’heure.

Fichier non déposé

Dates et versions

hal-02023775 , version 1 (18-02-2019)

Identifiants

  • HAL Id : hal-02023775 , version 1
  • OKINA : ua18855

Citer

Camille Rouxpetel, Albrecht Burkardt. Reductio Orientis ? De l’étrange au familier dans les récits de pèlerinage occidentaux en Terre sainte (XIIe-XIVe siècle). Médiateurs et instances de médiation dans l’histoire du voyage, Pulim, pp.303-320, 2019, 9782842877309. ⟨hal-02023775⟩
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