Horizon Seksawa : relecture de l’œuvre de Jacques Berque pour la compréhension de l’espace marocain
Résumé
Eté 1947, Jacques Berque, alors qu'il travaille au coeur de la résidence générale à Rabat, suite à ses prises de positions iconoclastes sur le devenir de la colonisation, est considéré comme indocile et reçoit la mission d'accompagner les pèlerins à la Mecque. De ce voyage, il s'est abreuvé comme à une source non pas de jouvence mais de clairvoyance. Il en revient persuadé de l'échec politique du protectorat, et surtout, il saisit pour la première fois matériellement l'étendue d'un espace musulman. Noël 1947, nommé dans la circonscription d'Imi n'Tanout, seul civil au milieu des militaires, enfermé dans un bout du monde marocain, il administre, entre autres, une tribu du Haut Atlas occidental, les Seksawa, patronyme qui perdure depuis plus de huit siècles (Berque, 1989 : 124-126). De ce parcours, il tire une réflexion originale, critique de la doxa coloniale. Ici, nous nous intéresserons particulièrement à la question des représentations de l'espace marocain. En effet, alors qu'est érigée en réel 2 la dialectique fragmentaire du territoire marocain en bled Es Siba et bled El Makhzen, afin de légitimer la colonisation par la relecture idéologique des différentes formes historiques de construction de l'autorité sultanienne, il propose la vision de l'espace musulman déroulant « l’Atlas à l’Euphrate » (Berque, 1978²). Aux logiques rigides de lignes de forces immuables justifiant les prétendues fractures économiques et politiques, il
présente celle de la société comme « un tissu vivant, sans couture » traversé par de multiples mouvements (Berque, 1978).
Origine : Fichiers produits par l'(les) auteur(s)
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