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Chapitre D'ouvrage Année : 1991

Le mythe errant

Résumé

Le mot mythe a une curieuse errance. Ses origines sont anciennes comme l'indique sa forme héritée de l'ancêtre grec qui signifie récit, fable. Mais sa naissance est tardive et ne remonte pas au-delà du XIXe siècle. La première attestation dûment répertoriée porte la date de 1818 alors que le dérivé mythologie est déjà observé au XIVe siècle (et mythologique au XVe). Il peut arriver en effet aux générations lexicales ce qui se produit parfois dans les familles où l'oncle est plus jeune que le neveu. La branche cadette d'où est issue la mythologie et qui se rattache au latin mythologia a ainsi précédé la branche aînée, sans doute parce que sa forme savante autorisait un transfert direct en dehors de toute concurrence, alors que la forme simple devait affronter les formes déjà en place : conte, fable, légende et un peu plus tard récit. La naissance du mot mythe semble liée au mouvement philologique et comparatiste qui se développe en Allemagne au début du XIXe siècle et qui prend pour objet les mots et les moeurs des peuples indo-européens. Et le mot mythe apparaît alors pour désigner la permanence d'une structure commune qui sous-tend les apparences et les divergences des faits observés. Venu tard, le mot mythe a connu un rapide essor, auquel ont beaucoup contribué des sociologues, des ethnologues, des analystes du fait religieux et les partisans de Freud. Ainsi le mythe d'Œdipe est devenu familier à bien des gens qui ignorent ce qu'est un mythe et qui est Œdipe. Et en se vulgarisant le sens s'est dévalué au point de prendre parfois une valeur négative et de signifier un mensonge ou une illusion. La présente étude se propose de recenser les emplois du mot mythe et de ses dérivés dans la littérature française, à partir de la base documentaire du Trésor de la langue française. Le millier d’exemples relevés (et autant pour les dérivés) est alors soumis à l’analyse statistique, en variant les paramètres : époque, auteurs, genres, et en explorant l’environnement syntaxique et sémantique qui entoure le mythe dans chacune des phrases où le mot apparaît. Il ne s'agit ici que d'une synthèse purement mécanique, à l'image des portraits robots dont se nourrissent les enquêtes policières. Mais si l'on compare le résultat obtenu avec le portrait du mythe tel que le constitue l'analyse réfléchie des lexicographes, on ne peut pas ne pas être frappé par la ressemblance. Si aux vertus documentaires de l'informatique on ajoute sinon de l'intelligence, du moins un peu de calcul sélectif, on franchit un pas supplémentaire dans la voie de la rédaction assistée par ordinateur. L'avantage, faible lorsqu'on a affaire aux mots techniques ou aux mots concrets, n'est pas négligeable lorsqu'on aborde les nébuleuses lexicales qui, à l'instar du mythe, vagabondent dans l'espace du discours.
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Origine : Fichiers produits par l'(les) auteur(s)

Dates et versions

hal-01546454 , version 1 (24-06-2017)

Identifiants

  • HAL Id : hal-01546454 , version 1

Citer

Étienne Brunet. Le mythe errant. Faculté des Lettres et sciences humaines de Nice. Hommage à Claude Faisant (1932-1988), 3, pp.115-127, 1991, 2-251-62158-X. ⟨hal-01546454⟩
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