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Communication Dans Un Congrès Année : 2016

Expériences ordinaires déçues de la grande ville et imaginaires négatifs de l’urbain généralisé

Résumé

Les expériences ordinaires déçues de la grande ville et le retour remarqué d’imaginaires négatifs de l’urbain (Salomon Cavin et Marchand, 2010) dessinent une difficulté croissante de la ville métropolitaine à créer le fameux « vivre-ensemble ». Des tables rondes citoyennes ayant réuni 40 habitant-e-s de la région Île-de-France pour mettre en lumière leurs imaginaires de la grande ville capitale, ainsi que produire une spatialisation collective de leurs visions et attentes de la région et ses devenirs, font largement cas de ce questionnement partagé sur la capacité de la ville à participer du commun (Faburel et al., 2012). Or, les imaginaires forment un système dynamique et ouvert, par des expériences pratiques et des possibles plus ou moins revendiqués (Durand, 1968 ; Bachelard, 1974 ; Castoriadis, 1978 et Wunenburger, 2003), conditionnant en retour les pratiques spatialisées des habitants (Bédard, Augustin et Desnoilles, 2011). Mais comment, lorsqu’ils sont porteurs d’une valence négative, les imaginaires peuvent-ils être créateurs et animateurs de nouvelles constructions sociales des territoires ? Quelles alternatives (discrètes ou revendiquées, individuées ou collectives, etc.) sont-elles dès lors proposées ? Nous postulons ici que, loin de contribuer à alimenter des récits apocalyptiques, ces imaginaires constituent le terrain idoine d’émergence d’une nouvelle utopie contemporaine. Ils participent de désinvestissements de la grande ville (physiques, psychologiques, symboliques…), libérant ainsi l’espace idéel et matériel d’autres manières d’habiter, à la fois critiques et subversives. Ces imaginaires participent à la formation d’un « espace révolutionnaire émergeant » (Jameson, 2005, trad. 2007), en réaction au modèle métropolitain dominant. « Un état d’esprit est utopique, quand il est en désaccord avec l’état de réalité dans lequel il se produit. (…) Ces orientations qui dépassent la réalité seront désignées par nous comme utopiques quand, passant à l’action, elles tendent à ébranler, partiellement ou totalement, l’ordre de choses qui règne à ce moment. » (Mannheim, 1929, p.63). Non sans lien à la crise écologique, cette utopie post-urbaine qui se dessine repose sur des imaginaires concrets de la décroissance. Repartant des tables rondes citoyennes, les habitants déplorent largement l’accélération et le stress produit par la répétitivité et le temps consommé dans les mobilités quotidiennes au détriment d’une plus grande liberté dans le choix de rythmes de vie. Cette volonté de reprise de leurs modes de vie passe notamment par un souhait remarqué de ré-humanisation du quotidien, un ancrage dans des sociabilités locales (retissage de liens de réciprocité) et une écologie du proche (une nature ordinaire et ses expériences sensibles). Dès lors, si certains chercheurs (Steinführer et Haase, 2007 ; Florentin et al., 2009 ; Baron et al., 2010 ; Roth, 2011) distinguent des catégories socio-historiques de territoires concernés par la décroissance (d’un côté les villes ouest-européennes et nord-américaines qui n’auraient pas su maîtriser les conséquences de la désindustrialisation et de la tertiarisation de l’emploi à partir des années 1970 ; de l’autre les villes postsocialistes d’Allemagne, de Pologne et d’Europe de l’Est dans les années 1990), nous considérons au contraire que la décroissance constitue une utopie concrète et globale face au système néo-libéral, son organisation métropolitaine ségrégative, mais surtout le détournement des enjeux politiques par des logiques marchandes. Si la notion d’utopie retrouve par là même son ancrage culturaliste (critique de la société de consommation) et naturaliste (dénonciation du productivisme), elle renoue surtout avec un héritage politique par des revendications d’une démocratie plus inclusive et directe.
Fichier non déposé

Dates et versions

hal-01392390 , version 1 (04-11-2016)

Identifiants

  • HAL Id : hal-01392390 , version 1

Citer

Guillaume Faburel, Mathilde Girault. Expériences ordinaires déçues de la grande ville et imaginaires négatifs de l’urbain généralisé. Colloque international « Utopies Culturelles Contemporaines » 7ème Rendez-vous de Géographie culturelle, Ethnologie et Études culturelles en Languedoc-Roussillon « , UMR ART Dev, 2016, Nîmes, France. ⟨hal-01392390⟩
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