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Chapitre D'ouvrage Année : 2010

Divination

Résumé

Du latin divinatio, deviner, le terme " divination " désigne l'action qui se donne pour objectif de deviner, prévoir et/ou influencer une réalité cachée, à l'aide de la lecture d'éléments, ou présages, selon une technique particulière impliquant leur observation ou leur manipulation. Ainsi définie, la divination apparaît comme une pratique universelle des sociétés humaines. Les procédures divinatoires peuvent être motivées par diverses raisons : découvrir les causes d'une maladie ou d'une infortune, retrouver un objet perdu, connaître les déterminations pesant sur l'avenir proche (dans le domaine de l'amour, du travail, etc.), être informé des circonstances propices à la réalisation d'une action ainsi que de ses chances de succès (départ à la guerre ou à la chasse, construction d'une maison, installation sur un territoire, etc.). La divination peut aussi être exécutée de manière quasi automatique, parce qu'elle est requise en telle circonstance par la tradition ou qu'elle fait partie intégrante d'un rituel. La divination est, soit explicative — et renvoie alors à des éléments passés, soit prédictive — permettant de connaître l'avenir de sorte à agir en conséquence. Elle peut être réalisée pour le compte d'un individu, d'un groupe, ou d'un "bien" (du bétail, par exemple). Les éléments qui servent de présages sont variés et leur lecture est susceptible d'être effectuée selon des procédés très divers : observations et/ou manipulations d'entrailles d'animaux sacrifiés, de vols d'oiseaux, de craquelures sur une carapace de tortue calcinée, de marc de café, de combinaisons d'objets lancés, de cartes, de présence de taches dans un jaune d'oeuf, de l'emplacement des planètes, etc. Cette multiplicité des techniques s'illustre par la diversité des termes formés à partir de la racine grec mantikê — divination — pour les désigner : chiromancie, géomancie, cartomancie, etc. La divination peut aussi être opérée sans autre support que le devin lui-même. Elle s'inscrit alors plutôt dans le domaine de la voyance : le devin établit un contact qui est dit direct — via les rêves, la transe ou la possession — avec des forces surnaturelles. Mais si de multiples classifications des formes de divination ont été proposées (formes ou techniques intuitives, inspirées, inductives, raisonnées…), aucune n'apparaît universellement pertinente, et il semble plus utile de se référer aux classifications indigènes – les modes de divination étant généralement pluriels dans une même société. Les processus divinatoires impliquent généralement un spécialiste, appelons-le devin, dont la fonction est plus ou moins institutionnalisée selon les sociétés (existence ou non de rites publics d'intronisation, reconnaissance étatique ou rejet, etc.). Le statut de devin s'acquiert de différentes manières, qui peuvent être cumulables, telles que le don — présenté comme inné ou transmis (par un être surnaturel ou par héritage) — ou un savoir-faire (qui peut tirer son efficacité de la maîtrise d'une technique traditionnelle ou d'un contact direct avec des esprits). Si chaque société attribue des compétences variables à la figure du devin, il est fréquent que le résultat de la divination dépende, aux yeux de ceux qui y ont recours, de plusieurs facteurs récurrents. En premier lieu, on peut citer la technique utilisée par le devin, qui est souvent perçue comme ayant une efficacité propre, si elle est bien effectuée. Un second facteur est la force de l'ancrage dans un domaine extérieur (monde des esprits, correspondances numériques, lois cosmiques, etc.) que la technique divinatoire permet, et qui légitime le diagnostic du devin dans un ordre qui le dépasse, garantissant de ce fait la véracité de son discours. Un troisième, enfin, concerne les aptitudes propres du devin, qui lui permettent de maîtriser la technique divinatoire et d'accéder à ce qui est caché et qu'il faut révéler : même si le devin n'est pas censé être l'auteur des messages qu'il délivre, ce sont cependant ses capacités qui lui permettent de découvrir les présages et d'en d'expliciter le sens. En se fondant sur la combinaison, qui semble résulter du hasard, des éléments qui servent de présages, la procédure divinatoire manipule l'aléatoire pour mieux le dépasser. Une signification étant attribuée à chacune des combinaisons possibles, le hasard est exclu de la trame des événements. L'incertitude qui motive la divination se trouve alors intégrée dans un ordre intelligible et rassurant. De ce fait, l'analyse des processus divinatoires informe sur les conceptions indigènes de la causalité. Les résultats de la divination peuvent renvoyer à un système de correspondances, qui fait que les procédures divinatoires relèvent d'un processus de rationalisation : elles activent un ordre classificatoire et les systèmes de correspondances participent à un acte de mise en forme du monde (elles sont d'ailleurs parfois liées aux systèmes d'écriture). Mais les résultats de la divination peuvent aussi renvoyer à une forme de communication avec des forces spirituelles ; ils représentent alors un élément constitutif du domaine religieux. Dans les nombreuses sociétés pour lesquelles la divination est avant tout une technique de désignation des causes des infortunes, les questions posées lors de la divination prennent la forme d'une alternative telle que : est-ce tel esprit ou tel autre ? D'où l'aboutissement à la nomination d'un esprit comme responsable du mal ; c'est même de la sorte que la notion d'esprit est activée dans ces sociétés.
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Origine : Fichiers produits par l'(les) auteur(s)

Dates et versions

hal-01292260 , version 1 (28-03-2016)

Identifiants

Citer

Grégoire Schlemmer. Divination. Hervieu-Léger, Daniel; Azria, Régine Dictionnaire des faits religieux, PUF, pp.267-269, 2010, 978-2-13-054576-7. ⟨hal-01292260⟩
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