Ponctuation et narration chez Rabelais et ses contemporains
Résumé
Les théories qui sous-tendent les usages ponctuants au XVIe siècle en France portent sur la mise en relief de la syntaxe et des parties du discours, éventuellement sur le rythme de la phrase, mais non sur la visibilité graphique d'un élément sonore. L'analyse dominante du signe écrit repose encore, à cette époque, sur la tripartition aristotélicienne et aussi stoïcienne entre signe mental/ signe vocal/ signe écrit, le dernier ne représentant le premier que par l'intermédiaire du second. Toutefois, l'idée de l'autonomie du scriptum fait son chemin, depuis Isidore de Séville, et ce que Parkes appelle une " grammaire de la lisibilité " (1992 : 23) s'élaborerait très tôt. La ponctuation n'ayant pas de vox d'appui, le ponctème est porteur de signification en soi, dans l'ordre de la marque graphique et du scriptural. Avant que les rhétoriciens de l'âge classique n'imposent à nouveau un rapport entre la ponctuation et la mélodie de la phrase, la virgule n'a pas de " voix ". Étudier la distribution des signes de ponctuation dans la narration constitue une tentative de délimitation des genres du récit par rapport au traité ou à l'essai d'un point de vue " méta-physique ", quand la ponctuation régulière donne à voir la structure de la langue comme celle de l'univers, qu'il soit fictif ou non.