La production de sens synecdochique : relation partitive et/ou phénomène de saillance ?
Résumé
La définition de la synecdoque s'oppose à celle de la métonymie par le fait que la relation qui la sous-tend est partitive, ce qu'on nomme généralement un rapport d'inclusion ou d'appartenance logique, alors que la relation métonymique signe un rapport de contiguïté. Le mode de partition détermine en outre un classement en synecdoque généralisante (notion intégrante pour notion intégrée : tout / partie, pluriel / singulier, etc.) ou particularisante (singulier / pluriel, contenu / contenant, notion intégrée pour notion intégrante, etc.). Je m'intéresserai ici à la relation entre méronyme et holonyme (du type Les voiles au loin descendant vers Harfleur ou Au loin court quelque voile hellène, Hugo). Cette relation partitive synecdochique est habituellement traitée en termes de décalage dénominatif par rapport à une dénomination plus attendue, mais non sollicitée dans le discours. Pourquoi l'énonciateur actualise-t-il le méronyme au lieu de l'holonyme qui semblerait plus approprié au regard de la visée référentielle ? C'est cette question qui sous-tend l'analyse que je propose dans cet article. Elle part de l'énonciateur lui-même, et articule énoncé et énonciation : à l'origine du processus synecdochique, il y a une parole émanant d'un corps parlant, et donc la construction d'une subjectivité implicite, liée à la source du dire. Cette approche de la relation partie / tout ne s'inscrit pas dans la continuité des définitions rhétoriques traditionnelles de la synecdoque (fondées sur un rapport de partition en langue), mais privilégie le rapport au monde construit par le discours de l'énonciateur, ce dernier, selon cette optique, perspectivisant son dit en déport de la représentation plus prototypique.