"Se ronger les ongles": lieu commun du travail d'artiste ou métaphore contre-nature?
Résumé
Il y a des métaphores qui sont inévitables, leur forme est indissolublement liée au sens qu'elles véhiculent. On ne choisi pas de les employer, elles ressortent de façon spontanée à notre esprit avec la conscience qu'il n'y a que ces mots qui s'adaptent parfaitement à notre pensée. La métaphore de " se ronger les ongles " est une métaphore inévitable : employée par Horace et Perse pour représenter le labor limae du travail d'artiste auquel l'écrivain doit se soumettre, elle sera reprise, remaniée et renversée par les humanistes du XVIème siècle. Nous chercherons donc de reconstruire le fil rouge qui porte de la satire latine à la critique culturelle de Du Bellay, La Boétie et Montaigne. La métaphore comme exercice nécessaire se transformera en attaque au pédantisme et à la littérature de cour, mais elle ne cessera jamais de renvoyer au noyau interprétatif archétypique à démonstration que, comme il le dit Proust, la métaphore seule peut donner une sorte d'éternité au style.
Origine : Fichiers produits par l'(les) auteur(s)