Content Regulation in an Age of Fake News and Hate Speech
La régulation des contenus sur Internet à l’heure des « fake news » et des discours de haine
Résumé
In France and in Europe, new laws that criminalize “fake news” and hate speech have sparked controversies for they are blamed for installing new mechanisms of private censorship of the Internet. Beyond the relationship between states and platforms, the issue of content regulation implicates a heterogeneity of actors, including media, activists, advertising agencies and Internet users, who develop their practices of regulation. This article aims to analyze the current controversies around content regulation in France, in order to understand how they influence the exercise of freedom of expression online.
En Francia y en Europa, se aprueban nuevas leyes. muy controvertidas, que penalizan las noticias falsas y los discursos de odio. Se les reprocha especialmente la instauración de una nueva forma de censura delegada de los Estados hacia las plataformas web, desarrollando nuevos dispositivos de filtrado y de bloqueo de contenidos. Más allá de la relación entre los Estados y las plataformas, el tema de la regulación de contenidos implica a una gran diversidad de actores, incluidos los medios de comunicación, activistas, agencias de publicidad y usuarios de Internet, que desarrollan sus propias prácticas de regulación. Este artículo analiza las controversias actuales alrededor de la regulación del contenido en línea, para comprender cómo están influyendo en las condiciones de ejercicio de la libertad de expresión en Internet.
La régulation des contenus sur Internet à l'heure des « fake news » et des discours de haine « Fake news », propagande ciblée, cyberharcèlement et discours de haine : ces trois dernières années, les « troubles informationnels 1 » ont occupé une place importante dans l'agenda médiatique. Face à ces menaces, réelles ou fantasmées 2 , la riposte des pouvoirs publics en France et en Europe s'est traduite par une véritable inflation législative en matière de régulation des contenus sur Internet. Ces textes de loi, dans leur diversité, font face à une même critique : ils instaureraient une forme de délégation des pouvoirs de censure depuis les États vers les grandes plateformes du web. Dans le sillage de ces nouvelles réglementations, celles-ci se voient, en effet, octroyer de nouvelles responsabilités, qu'elles exercent souvent dans la plus stricte opacité. Pour autant, la question de la régulation de la parole publique en ligne dépasse largement les relations entre États et plateformes, et implique une grande diversité d'acteurs qui développent des pratiques alternatives de régulation culturelle : les médias misent sur le fact-checking (la « vérification des faits ») et la certification de
l'information ; des activistes s'engagent dans des actions collectives de contre-discours ou pratiquent le name and shame (« désigner et dénoncer ») pour lutter contre le financement de sites extrémistes ou manipulateurs ; des entreprises mettent sur le marché des solutions de brand safety (« sécurité des marques »), et les internautes eux-mêmes sont enrôlés dans des initiatives de vigilance participative. Les controverses actuelles sur la régulation des contenus sont ainsi le théâtre d'une reconfiguration des relations entre ces acteurs sur le marché de l'information, reconfiguration qui a des conséquences déterminantes sur les conditions d'exercice de la liberté d'expression sur Internet. Dans cet article, nous brosserons les grands enjeux de ces controverses, afin d'interroger les logiques et dispositifs de la limitation de la parole en ligne à un âge « post-censure ».