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Chapitre D'ouvrage Année : 2014

Les lacs et les zones humides de Russie

Résumé

Les chercheurs russes et soviétiques ont été parmi les premiers au monde à quantifier le nombre de lacs sur l’ensemble de la planète, ainsi que leur superficie cumulée et leur volume total, en extrapolant les décomptes très précis qu’ils avaient faits à l’échelle de l’URSS. Les chiffres actuels de limnicité mondiale leur sont dus. Une meilleure connaissance de la limnologie russe en France a donc non seulement un intérêt de géographie régionale mais aussi d’épistémologie générale. Selon certains auteurs, le tiers des lacs du monde se trouve dans le monde russe. Le territoire russe ayant majoritairement un climat continental, aux hivers très froids et aux étés chauds, le régime thermique des lacs russes est à quatre temps : une stratification directe en été, une homothermie automnale, qui permet aux vents de brasser la colonne d’eau et d’apporter l’oxygène jusqu’au fond, une stratification inverse hivernale, une homothermie printanière, qui autorise le retour des brassages. Les lacs russes sont donc généralement dimictiques, possédant deux mélanges saisonniers complets, favorables à l’oxygénation. A l’arrivée de la saison froide, les lacs russes prennent en glace en trois grandes étapes (aiguilles et bouillie, puis radeaux s’entrechoquant pour former la glace en crêpes et enfin cimentation des plaques de glace). Une attention particulière est portée aux différences spatiales à l’intérieur de chaque lac. En fin d’automne, le littoral lacustre est déjà gelé par la glace de rive (le zabéreg), cependant qu’il n’y a que de la bouillie de glace au large. En hiver, sur les littoraux, la couche de glace va de la surface au fond. Quand le printemps revient et que les vagues l’arrachent, ce pied de glace participe à l’érosion de la falaise lacustre. Au large, la banquise lacustre flotte sur la masse d’eau et accompagne l’abaissement de niveau de celle-ci pendant tout l’hiver. La banquise lacustre a une grande importance pour la société russe, d’une part pour la pêche blanche qui s’y pratique en trouant la glace, d’autre part pour la circulation automobile qui s’y effectue, sur lesdits « chemins d’hiver ». Cette circulation est rendue plus difficile par la « respiration » (alternance de dilatation de rétractation) des fractures et des articulations de la banquise, qui crée des obstacles, les torossy. Les clairières de glace, les polynies et les propariny peuvent être dangereuses, si bien qu’elles sont suivies précisément par les autorités russes. A l’arrivée de la saison chaude, trois étapes font se succéder la fonte des cours d’eau tributaires, puis la fonte des littoraux lacustres, et enfin la fonte au large, en plein lac. Les lacs russes connaissent un fort marnage naturel parce que les tributaires fluviaux qui les alimentent ont un régime nival, immodéré, faisant se succéder de faibles débits de saison froide, quand l’eau est retenue sous forme solide dans le bassin, et de forts débits lors la fonte printanière ou estivale. Les fortes oscillations de niveau saisonnières restent dans la dimension verticale chez les lacs creux, mais provoquent de grandes variations de superficie chez les lacs plats, comme le Taïmyr. Les lacs forment une chance pour la modération des cours d’eau émissaires. L’Angara est ainsi le cours d’eau le plus modéré de Sibérie grâce au lac Baïkal qui écrase les différences saisonnières par son énorme volume. Les zones humides, formées de marais et de tourbières, prennent une grande place en Russie. Pour signifier cette importance, les chercheurs russes ont créé le terme de zabolotchennost, qu’on pourrait traduire par marécagicité et qui représente la part du territoire total en zones humides. Celle-ci atteint 70 % dans la plaine de Sourgout. Les Russes disent que le marais de Vassiougan est le plus grand de l’hémisphère nord. Après des politiques d’assèchement jusque dans les années 1970 dans divers buts d’exploitation (centrales thermiques fonctionnant à la tourbe, etc.), les autorités soviétiques ont signé en 1977 la convention de Ramsar et de nombreux programmes de protection ont vu le jour depuis. Le delta de la Sélenga dans le Baïkal et une partie de celui de la Volga dans la Caspienne cumulent leur inscription au patrimoine mondial de la l’humanité et en liste Ramsar.
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Dates et versions

hal-03772273 , version 1 (08-09-2022)

Identifiants

  • HAL Id : hal-03772273 , version 1

Citer

Laurent Touchart. Les lacs et les zones humides de Russie. Les territoires de l’eau en Russie, L'Harmattan, pp.125-162, 2014, 978-2-343-02596-4. ⟨hal-03772273⟩
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