Épistémologie de la pandémie de COVID-19 au prisme de la recherche culturelle en sciences de l’éducation
Résumé
Il semble assez vain désormais, au bout d’un an et demie de pandémie mondiale, et de passages de confinements-dé/re-confinements variés, locaux, académiques ou nationaux, de ne plus considérer ce phénomène comme un fait social total. La réponse médicale pour gérer cette crise se heurte aux représentations sociales qui font obstacles aux attentes médicales (Rousselon, 2012), aux préconisations et aux protocoles sociétaux pour se soigner (Keck, Kelly et Lynteris, 2019). Les risques de mises à distance de certaines populations et l'identification d’un “bouc émissaire” (Sidéris, 2020) et l’accentuation de clivages sociétaux sont réels. Ainsi, la maladie est vécue dans sa dimension anthropologique et culturelle comme une rupture identitaire et sociale avec la communauté, aboutissant à un isolement mortifère et à la perte de signification du lien social. Lefer Sauvage et Mercier (2021) mentionnent d'ailleurs un glissement sémantique intéressant dans le discours des enseignants pour tenter de s’approprier le protocole sanitaire en vigueur dans les écoles, en mentionnant désormais une « distance sociale » plutôt qu’une « distance physique », et en oubliant les indicateurs métriques de référence (une distance d’un mètre devient « La Distance »). Nous adoptons donc ici une posture pragmatique (Auray, 2016) qui consiste à penser que « toute redescription prend la forme d'une recontextualisation, dont l'objectif est de connecter l'objet redécrit avec une nouvelle théorie explicative, une nouvelle classe de comparaison, un nouveau vocabulaire descriptif » (Michel, 2011, p. 66).
En tant que psychologues, nous tentons de poser un diagnostique de cet état de fait qu’est la pandémie et considérons que cette pandémie traumatisante peut-être vue (au sens de Wittgenstein, 2004) comme mettant la société dans le quotidien d'enfants présentant des troubles autistiques. Alors que les institutions, les professionnels, les associations et les familles sont dans « l’attente » d’un potentiel Plan Autisme V, nous inventons ici, au regard du phénomène pandémique, les grandes lignes de ce que ce plan pourrait devenir, toujours dans une articulation subtile entre le phénomène social de la pandémie et celui de l’autisme, considérant qu’une dialectique est possible. C'est à travers un ensemble d'enquêtes (Genevois et al., 2020 ; Mercier, 2020 ; Lefer Sauvage et al., 2020) et de témoignages que nous constituons les grandes lignes de ce Cinquième Plan autisme.