"Les fictions à l’épreuve de l’image, même rayée(s) à mort"
Résumé
La thèse défendue par Jean-Luc Godard dans Histoire(s) du cinéma, celle d’un art qui aurait manqué l’histoire du XXe siècle, et plus précisément failli devant le désastre de la Seconde Guerre mondiale, repose sur une mise en cause des pouvoirs de la fiction, pour lesquels le cinéma aurait trahi sa "vocation à la présence" et au témoignage – écrit Jacques Rancière dans La Fable cinématographique. De fait, le dispositif esthétique et discursif retenu par JLG dans son film-monument consiste inversement à détourner et à retourner les images contre les récits qu’elles servent, contre la "fiction au pouvoir", pour en dégager les virtualités et l’historicité propre. Nous mettons la thèse godardienne à l’épreuve de sa méthode en analysant la fin de l’épisode 3A ("La monnaie de l’absolu"), où l’une et l’autre s’exposent tout particulièrement, afin de déterminer si et comment, selon Jean-Luc Godard, "même rayé à mort, un simple rectangle de trente-cinq millimètres sauve l'honneur de tout le réel".