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Chapitre D'ouvrage Année : 2008

Who are the individuals in politics?

Qui sont les individus de la politique ?

Résumé

In general philosophy, an individual is a being, distinct from other beings. It is the elementary term that is arrived at by analytically decomposing a composed reality and that cannot itself be decomposed into individuals. It is thus defined by its unity (internal cohesion) and by its uniqueness (external differentiation). Internal cohesion can be thought of in at least two ways, as simplicity (the individual is not composed of parts) or as self-sufficiency (the individual is an autonomous being). External differentiation can also be thought of in at least two ways: as separation (an individual is separated from others by spatio-temporal boundaries) or as singularity (an individual is distinguished from others by his or her unique nature) . In political philosophy, the term takes on another meaning: an individual is a particular human being. From one concept to another, however, there is less substitution than reduction: a particular human being is a human being who is one (it is not a collection of men, but one) and distinct from other beings (other men). Just as the individual in the general sense is sometimes conceived, according to a physical paradigm, as an elementary atom entering into the composition of a body, or again, according to a biological paradigm, as a specimen of a species, situated in a genealogy , the individual of politics is presented alternately as the elementary atom of the social body or as the particular specimen of the human species. Political terminology only follows the evolution of everyday language, which from the seventeenth century onwards identifies the "individual" with the particular man. But this lexical reduction risks being accompanied by the eviction of an essential question: who are the individuals (in the general sense) of politics? Lexical evolution alone does not allow us to evacuate this question. It would be tantamount either to considering it resolved, by postulating that the particular man is the only individual who is of interest to politics, or to considering it superfluous, by postulating that ontology is not relevant to political philosophy. We will show here that both these postulates are erroneous. The individual considered here is an ontological reality, and not simply a logical tool. For a thing to be an individual, it is not enough that one can, through an effort of abstraction, represent it as coherent and differentiated, which is feasible for every countable thing; rather, it must actually present these qualities. It is not necessary, however, to adopt an objectivist metaphysics and assume that certain things are objectively individuated, that they exist as individuals independently of the human mind. It is enough to consider that the human mind conceives certain things as being one, not by an arbitrary effort of abstraction, but by virtue of properties that they manifest. There are beings which are such that we have good reasons to conceive them as one. In this perspective, the ontological individual differs from the logical individual in that he manifests, in addition to the mere enumeration, other properties: he is coherent because simple, if not self-sufficient, he is differentiated because separate, if not singular. What, in politics, is such that it must be conceived as being one?
En philosophie générale, un individu est un être un, distinct d'autres êtres uns. Il est le terme élémentaire auquel on parvient en décomposant analytiquement une réalité composée et qui ne peut pas être lui-même décomposé en individus. Il se définit donc par son unité-par cohésion interne-et par son unicité-par différenciation externe. La cohésion interne peut être pensée au moins de deux manières, comme simplicité-l'individu n'est pas composé de parties-ou comme auto-suffisance-l'individu est un être autonome. La différenciation externe peut elle aussi être pensée d'au moins deux façons : comme séparation-un individu est séparé des autres par des frontières spatio-temporelles-ou comme singularité-un individu se distingue des autres par sa nature unique sans équivalent. En philosophie politique, le terme prend un autre sens : un individu est un être humain particulier. D'un concept à l'autre, il y a toutefois moins substitution que réduction : un être humain particulier est un être humain qui est un (ce n'est pas une collection d'hommes, mais un seul) et distinct d'autres êtres uns (les autres hommes). De même que l'individu au sens général est parfois conçu, selon un paradigme physique, comme un atome élémentaire entrant dans la composition d'un corps, ou encore, selon un paradigme biologique, comme un spécimen d'une espèce, situé dans une généalogie 1 , l'individu de la politique est présenté alternativement comme l'atome élémentaire du corps social ou comme le spécimen particulier de l'espèce humaine. Le vocabulaire politique ne fait certes que suivre l'évolution de la langue courante, qui identifie, à partir du XVII e siècle, « l'individu » à l'homme particulier. Mais cette réduction lexicale risque de s'accompagner de l'éviction d'une question essentielle : qui sont les individus-au sens général-de la politique ? La seule évolution lexicale ne nous autorise pas à évacuer cette question. Cela reviendrait soit à la considérer résolue, en postulant que l'homme particulier est le seul individu qui intéresse la politique, soit à la considérer superflue, en postulant que l'ontologie n'est pas pertinente pour la philosophie politique. Nous montrerons ici que ces deux postulats sont erronés. L'individu envisagé ici est une réalité ontologique, et non simplement un outil logique 2. Pour qu'une chose soit un individu, il ne suffit pas qu'on puisse, par un effort d'abstraction, se la représenter comme cohérente et différenciée-ce qui est faisable pour toute chose dénombrable ; il faut plutôt qu'elle présente effectivement ces qualités. Il n'est toutefois pas besoin d'adopter une métaphysique objectiviste et de supposer que certaines choses sont objectivement individuées, qu'elles existent comme individus indépendamment de l'esprit humain. Il suffit de considérer que celui-ci conçoit certaines choses comme des êtres uns, non par un effort arbitraire d'abstraction, mais en vertu de propriétés qu'elles manifestent. Il y a des êtres qui sont tels que nous avons de bonnes raisons de les concevoir comme uns. Dans cette perspective, l'individu ontologique se distingue de l'individu logique en ce qu'il manifeste, en plus de la seule dénombrabilité, d'autres propriétés : il est cohérent car simple, si ce n'est auto-suffisant, il est différencié car séparé, si ce n'est singulier. Qu'est-ce qui, en politique, est tel qu'il faut le concevoir comme un être un ?

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Citer

Charles Girard. Qui sont les individus de la politique ?. P. Ludwig et T. Pradeu (dir.), L'individu. Perspectives contemporaines, Paris, Vrin., A paraître. ⟨hal-03005648⟩
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