Trouble-fête en Révolution
Résumé
Début octobre 1976 apparaît aux devantures des libraires un ouvrage appelé à faire date : La Fête révolutionnaire, 1789-1799. Sur la quatrième de couverture, une question à la tonalité frondeuse : « Une sensibilité contemporaine attend aujourd’hui de la fête, comme de la Révolution, la métamorphose radicale du Vieux Monde. La fête est-elle en soi révolutionnaire ? » De l’œuvre si ample de Mona Ozouf, je veux retenir ici ce superbe in-octavo de quelque 350 pages qui s’ouvre, en son milieu, sur un cahier en couleurs, et qui garde sur moi un extraordinaire pouvoir. Au-dessus du nom de l’auteur, comme un arc venant cintrer un mur blanc, trois mots en demi-cercle : « Bibliothèque des histoires », armature toute visuelle mais qui cherchait à rompre avec ce que Proust aurait désigné comme un « enveloppement nébuleux de modes détrônées ».Le demi-cercle est la figure dont l’escrime ou l’art militaire vantaient autrefois la qualité de parade. Reconnaissons-le : le livre de Mona Ozouf fut à la hauteur. Finesse de l’observation, précision du langage, il prit à revers bien des techniques narratives, de celles qui marchaient d’un pas de régiment. Sur le pont de l’histoire, Pierre Nora, fondateur de cette « Bibliothèque », l’a proclamé. Il attendait de ce pluriel (« des histoires ») un « effet de surprise ». Le mot renvoie à tout un arrière-plan aujourd’hui presque effacé. À l’épuisement de l’histoire économique et sociale. Au rejet de l’approche sérielle, avec ses mornes statistiques…