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Chapitre D'ouvrage Année : 2018

« Orelsan et la parodie du discours gnangnan »

Résumé

Dans les textes d'Orelsan, la parodie s'exerce contre le discours machiste ou viriliste du canteur, c'est-à-dire du locuteur qui s'exprime dans la chanson et qui doit être distingué du chanteur. Le sujet masculin blessé / blessant auquel Orelsan prête sa voix, sa rhétorique, n'est jamais institué comme un porte-parole crédible de l'artiste et encore moins comme un modèle à suivre : émouvant ou odieux, c'est un pauvre type contradictoire et risible, un objet de satire plus que d'admiration. Le parcours est fixé. Nous commencerons par définir la notion quelque peu embarrassée de parodie. Nous adopterons et adapterons les propositions de Gérard Genette dont l'ouvrage sur le sujet (Palimpsestes, La littérature au second degré, Paris, Seuil, coll. Poétique, 1982) est désormais un classique. Le point essentiel consistera à articuler la notion de discours parodique et celle de discours polémique. Puis nous décrirons les formes variées que prend la parodie chez Orelsan quand elle vise le discours féminin, dénoncé comme gnangnan : on verra à quel point la parodie agressive permet de définir le rap comme un laboratoire poétique, expérimentant des formes éminemment polyphoniques. La violence transgressive ou scandaleuse des textes d'Orelsan rencontre en effet un parti-pris de dérision qui souligne les impasses des diatribes misogynes, qui sont le signe de l'impuissance et de la frustration. La chanson se déploie sur cette corde raide, d'où son audace ; elle dénonce les effets euphoriques et déréalisants de l'outrance verbale chez des êtres faibles, malheureux, passionnés, qui s'aveuglent sur leur propre situation et prennent leur revanche sur les femmes par les mots ; ce faisant, ils se barrent l'accès à des relations équilibrantes avec leurs partenaires féminines. Orelsan et la parodie du discours gnangnan Pour Clément, avec gratitude Choisissons de ne pas les distinguer : Orelsan et son groupe, les Casseurs Flowters, mettent en scène et en voix de jeunes urbains, vingt-cinq trente ans, hétérosexuels, issus de la classe moyenne et résolus, malgré un milieu social favorable, à réussir leur existence en la ratant. Ils se déclarent incapables de s'engager dans la vie affective et dans la vie professionnelle. Ils se décrivent comme des no life 1. Parfois, ils revendiquent (fièrement, joyeusement) leur immaturité et leur irresponsabilité ; d'autres fois, ils se moquent d'eux mêmes : « Bientôt 26 ans en pleine crise d'adolescence 2 » ou adoptent un profil bas et un ton déprimé. Cette immaturité est à la fois le boulet dont ils se plaignent et le ciment de l'amitié « entre potes », bref un signe d'identité et de reconnaissance ; mais c'est aussi et surtout le moteur de la création. L'inadaptation à la vie sociale y est décrite en termes de différence, comme l'affirme le refrain d'un de leurs tubes, Différents : « Nous on s'en bat les couilles de c'que disent les gens / On vit pas dans le même monde on est différents 3 ». La revendication de 1 No life est le titre du cinquième morceau de Perdu d'avance, album studio, label 3 e bureau (Auteurs : Orelsan et
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Origine : Fichiers produits par l'(les) auteur(s)

Dates et versions

hal-02013353 , version 1 (10-02-2019)

Identifiants

  • HAL Id : hal-02013353 , version 1

Citer

Stéphane Chaudier. « Orelsan et la parodie du discours gnangnan ». Perle Abbrugiati (dir.). Chanson et Parodie, Presses Universitaires de Provence, p. 223-243, 2018, Coll. "Chants Sons". ⟨hal-02013353⟩
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