« La référence classique dans la prose narrative »
Résumé
Résumé : On emploie parfois le mot classique pour qualifier un style, des oeuvres ou des auteurs du XX e siècle. Cet adjectif est souvent pris en mauvaise part ; une écriture classique risque fort de passer pour peu inventive. Mais la question des valeurs importe somme toute assez peu au regard de l'enquête sur la signification du mot lui-même. À quoi reconnaît-on un texte « classique » publié entre 1850 et 2000 ? Nul ne songe à contester le jugement intuitif selon lequel le style d'Anatole France, d'André Gide, de Raymond Radiguet, François Mauriac, Jacques Chardonne, Julien Green, Albert Camus, Marguerite Yourcenar, Michel Tournier, Patrick Modiano ou Pascal Quignard est plutôt « classique » ; on peut certes nuancer ce point de vue mais non le rejeter complètement. Les spécialistes feront valoir les baroquismes de Feux de Yourcenar (1936) ou les outrances de La Place de l'Étoile de Modiano (1968). On pourra discuter de l'opportunité d'ajouter ou de retrancher quelques noms dans cette liste purement indicative. Mais peu importe : car il y a un air de famille entre les écrivains « classiques » du XX e siècle. À quoi tient cette ressemblance ? Non à un imaginaire ou à une idéologie, mais bien à l'usage d'une langue. Gilles Philippe oppose à cet égard deux approches du style : la langue littéraire est traitée soit comme un laboratoire soit comme un conservatoire. Dans le premier cas, l'écrivain revendique le droit d'expérimenter de nouvelles formes d'expression ; dans le second, il s'agit non d'inventer mais de recueillir un héritage. Mais lequel ? Comment définir la tradition qu'il veut maintenir ? Est-ce la langue et l'esthétique du dernier tiers du « grand siècle » ? Répondre à cette question permettra sans doute de comprendre pourquoi des écrivains majeurs ont jugé bon de s'approprier cette langue littéraire reçue du passé : quels mérites revêt-elle à leurs yeux ?
Origine : Fichiers produits par l'(les) auteur(s)