Profils fonctionnels fongiques : indicateurs d’écotoxicité des métaux dans les sols
Résumé
Les activités anthropiques ont conduit à d’importantes contaminations des sols par les métaux, à des niveaux parfois délétères pour les systèmes biologiques et le fonctionnement des sols. Grâce à leur capacité à sécréter des enzymes et à adapter leurs métabolismes à différentes sources de nutriments, les champignons sont des colonisateurs clés des écosystèmes terrestres. Les réponses fonctionnelles des champignons du sol aux métaux pourraient offrir des perspectives dans le développement d’outils pour l’évaluation des risques écotoxicologiques. Cependant, la connaissance de la relation entre la diversité fonctionnelle fongique et un stress métallique est encore très limitée. Dans ce travail, l’impact de métaux (Cu, Zn, Pb et Cd) sur les systèmes fonctionnels extracellulaires, i.e. les sécrétomes, a été étudié au niveau enzymatique et protéique chez une douzaine de souches fongiques isolées de sols agricoles, et cultivées en milieux liquides. Les études se sont focalisés sur deux familles d’enzymes impliquées dans les cycles biogéochimiques des sols : les hydrolases (phosphatase, β-glucosidase, β-galactosidase et N-acetyl-β-glucosaminidase) et les oxydoréductases (laccase, Mn- et lignine-peroxydases). Les résultats ont permis d’établir des profils de sécrétion caractéristiques d’exposition métallique. La réponse des hydrolases aux métaux présente une grande variabilité intracommunautaire. Elle dépend de la souche, du métal et de l’enzyme considérés. Chez les souches disposant d’un système oxydatif (50% des souches testées), les activités oxydoréductases sont stimulées uniquement par le Cu et le Cd, et non par le Zn et le Pb. Dans certains cas, des oxydoréductases non produites dans les cultures non exposées, sont spécifiquement synthétisées en présence de métaux. Au niveau protéique, nous avons montré que la stimulation des activités oxydoréductases par les métaux est fortement corrélée à la quantité de protéines sécrétées. Par ailleurs, les expositions métalliques conduisent à des modifications post-traductionnelles (isoformes glycosylées) et de production d’isoenzymes. L’étude de la sensibilité de la réponse des oxydoréductases a permis de relier cette réponse à une forme chimique du métal, i.e. la forme cationique, et de monter que cette réponse se produit à des niveaux de contamination environnementalement réalistes. De par la spécificité, la sensibilité et la généricité de leur réponse, les oxydoréductases fongiques se sont avérées être des biomarqueurs potentiels d’exposition aux métaux. Il est maintenant nécessaire de valider in situ ces outils biochimiques pour évaluer l’écotoxicité des métaux dans les sols.
Domaines
Sciences du Vivant [q-bio]
Origine : Fichiers produits par l'(les) auteur(s)