Quantification de la dynamique sous contrainte anthropique du lessivage et de la bioturbation à l’échelle pluri-décennale Apport de la micromorphologie
Résumé
The rates of argilluvation and bioturbation at a decennial to centennial time scale are poorly known. The present investigation aims at characterizing and quantifying these processes after a change in land use and the introduction of organic amendments along a anthropo-chrono-sequence (Feucherolles, Ile de France) with one Luvisol under deciduous forest, one under conventional agricultural management and another cultivated Luvisol with regular manure spreading for the last 15 years. Thin section studies were carried out on each horizon. After having identified the appropriate micromorphological indicators, a specific point counting procedure was designed to quantify macropores, illuvial clay and biological features. Firstly, the results show that there are variations of the selected indicators along the selected soil profiles. Land use change and manure spreading act on particulate matter transport through direct and indirect effects on complex interactions linking bioturbation, soil structural stability and pore network and finally the nature and the quantity of the transported particulate matter. As a whole, cultivation induced a greater degree of argilluviation leading to a quantifiable soil differentiation after only some centuries. On the opposite, about 15 years of manure spreading only affected bioturbation but may induce on longer time scales a lesser degree of argilluviation. Finally, our study points out the fact that land management effect is done more through its influence on the biotic factor. Argilluviation is active in soils under present climatic conditions on shorter time scales than commonly thought.
Les dynamiques des processus de lessivage et de bioturbation dans les sols sont peu connues. L’objectif de ce travail est de caractériser et de quantifier la réponse de ces processus à l’impact de la mise en culture et des apports de matières organiques à l’échelle pluri-décennale. Pour ce faire, l’intensité de la bioturbation et du lessivage ont été quantifiées à l’aide d’une approche de micromorphologie des sols le long d’une anthroposéquence constituée de trois sols développés sur loess: un Luvisol sous forêt, un Luvisol cultivé et un Luvisol cultivé amendé avec du fumier depuis 15 ans. Suite à une phase d’identification et de sélection des indicateurs micromorphologiques d’intérêt, un protocole de comptage au point adapté à leur quantification a été construit. Les résultats montrent des variations concernant la nature et l’abondance des indicateurs retenus (macropores, revêtements argileux et traits biologiques). La mise en culture des sols et les apports de matières organiques impactent les transferts de matières particulaires en modifiant directement ou indirectement les relations complexes liant la nature et la localisation de la bioturbation, la stabilité structurale et le réseau poral des sols et finalement, la nature et la quantité des particules lessivées. La mise en culture s’est ainsi traduite par une augmentation de l’intensité du lessivage avec des conséquences quantifiables à l’échelle du profil de sol en quelques centaines d’années. L’apport de matières organiques sur une quinzaine d’années a eu des répercussions quantitatives sur la nature et la localisation de la bioturbation mais cette pratique est susceptible à plus long terme de ralentir le processus d’éluviation. Finalement, l’effet du mode d’occupation du sol sur l’activité biologique apparaît comme un facteur clé de l’évolution des sols à moyen terme. Le processus de lessivage est quant à lui actuellement actif et plus rapide que ce qui est classiquement admis dans la littérature.