Histoires de la pathologie du suicide - CAMPUS CONDORCET Accéder directement au contenu
Article Dans Une Revue Criminocorpus, revue hypermédia Année : 2018

Histoires de la pathologie du suicide

Eva Yampolsky
  • Fonction : Auteur
  • PersonId : 1032049

Résumé

L’une des premières questions qu’il convient de poser à l’histoire du suicide tient à la position du narrateur. S’agit-il de s’engager dans une explication du passage à l’acte ? S’agit-il plutôt de rendre compte des explications formulées dans un temps et un espace situé ? Les deux démarches sont également légitimes et nous n’avons pas choisi d’en privilégier une pour cette journée d’étude. La capacité de la mort volontaire à susciter la réaction sociale rend l’histoire sociale du suicide particulièrement complexe en raison du nombre de sources disponibles (droit, justice, théologie, philosophie, médecine, sciences humaines…). Cette variété appelle à une réserve méthodologique préliminaire sur la capacité de l’histoire à en rendre compte par une synthèse englobant plusieurs aires culturelles dans la longue durée. Nous ne possédons pas pour l’instant de synthèse sur le sujet, comparable au travail mené par Philippe Ariès sur la mort en Occident. Les contextes nationaux ne sont pas indifférents à l’évolution de la question et ils exigent de tenir compte de chronologies spécifiques avant d’établir un inventaire des différences, des similitudes et de circulations des savoirs. Ce qui a conduit, depuis ces dernières années, plusieurs historiens à mener des études comparatives du suicide sur les plans culturel, national et politique. Dans cette optique, la compréhension du suicide, de ses causes et des mobiles, exige une approche qui inscrit ce phénomène dans la spécificité culturelle et nationale qui le détermine. Ainsi, si l’on compare la situation de la France avec l’Angleterre, les différences paraissent a priori flagrantes sur le plan juridique, puisque le code pénal de 1791 décriminalise l’acte tandis que le suicide reste passible de poursuite durant toute la période victorienne (Anderson 1987 ; MacDonald et Murphy, 1993) et ne fut dépénalisé en Angleterre qu’en 1961. La tendance au retrait judiciaire, dans sa pratique, est pourtant similaire. Nous avons donc choisi pour cette journée d’étude de restreindre notre approche à la période contemporaine, prise sous l’angle de l’histoire des savoirs visant à produire une connaissance du phénomène suicidaire. Nous avons délibérément écarté la question du suicide dans la littérature au XVIIIe et au XIXe siècles, bien qu’il s’agisse d’un thème majeur qui a suscité de nombreuses études critiques (Alvarez 1973 ; Gates 1987 ; Bell 2011 ; Faubert 2015). Il ne s’agit pas pour autant d’ignorer les influences réciproques entre médecine et littérature, et tout particulièrement dans le champ de la folie et du suicide. Ces circulations, tant au niveau conceptuel et terminologique qu’au niveau descriptif, ont fait l’objet d’analyse en études littéraires et en humanités médicales, et qui permettent de mieux comprendre la médicalisation du suicide (Rigoli 2001 ; Roldan 2013). En précisant notre cadre d’études, nous avons également écarté certaines questions qui sont à la périphérie de l’acte du suicide, notamment le comportement autodestructeur qui a récemment fait l’objet d’études approfondies (Millard 2015 ; Chaney 2017). Les articles réunis dans ces actes partent de plusieurs axes d’études en histoire, qui ont déjà été bien élaborés, comme la question de la sécularisation et la médicalisation du suicide (MacDonald 1988, 1989 ; Kushner 1991), le rapport entre violence et suicide (Chesnais 1981) et la perspective du « genre » de la mort volontaire (Higonnet 1986 ; Kushner 1993 ; Fauvel 2016).
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Dates et versions

hal-01791594 , version 1 (14-05-2018)

Identifiants

Citer

Marc Renneville, Eva Yampolsky. Histoires de la pathologie du suicide. Criminocorpus, revue hypermédia, 2018, https://journals.openedition.org/criminocorpus/3775. ⟨10.4000/criminocorpus.3775⟩. ⟨hal-01791594⟩
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