Boléro et censure
Résumé
Dès son apparition au XVIIIème siècle le boléro est vecteur ou objet de la censure, état de fait qui se répercute au-delà des Pyrénées et tout au long du XIXème siècle, car, dans l'inconscient collectif, le boléro, tel les danses sensuelles qui ont préparé sa venue, correspond à l'archétype d'un rythme euphorisant, régi par le « principe du plaisir » et dont la libido constitue l'énergie potentielle. Ce « ça », essentiellement de caractère sexuel, ne cristallise pas uniquement des désirs de bonheur et de liberté dans la Péninsule, mais fait aussi rêver à l'étranger. Son essence mitigée entre l'exotisme et le brio permet au boléro d'être si bien adopté hors de ses frontières, qu'à son tour, il en arrive presque à provoquer le même type de réaction qu'à domicile. Alors, pour sauver l'ordre établi, ces fantasmes sont immédiatement proscrits par le « principe de réalité » des deux côtés des Pyrénées. Constituant des idiomes actifs contre le musellement, le boléro, la folía, la cachucha ou « la chahut » se voient réprimés par des décrets, des lois, ou décriés dans des essais éthico-didactiques.