Production de l’accent lexical russe par les apprenants francophones : origines des difficultés et pistes de remédiation
Résumé
Sur la base d’une étude expérimentale menée auprès de débutants francophones suivant un cursus intensif de russe à l’université, on montrera que leurs difficultés à produire l’accent lexical russe, pouvant frapper n’importe quelle syllabe, découlent non seulement des différences fondamentales entre les systèmes accentuels des deux langues, mais également de certains effets pervers de l’approche pédagogique adoptée. Disposant d’un nombre d’heures limité, les enseignants tendent à privilégier une méthode « accélérée » fondée sur l’écrit, la visualisation et, plus généralement, la conscientisation. Dans cette approche intellectualisante, l’enseignement de la réduction des voyelles atones (procédé accentuel négatif) passe par l’attribution à chacune d’un timbre particulier noté par un symbole spécifique (par exemple, en prétonique, /a/ et /o/ après consonne dure -> [ʌ] ; /a/, /e/ et /i/ après molle -> [i]), ce qui constitue un handicap certain. Un locuteur du français – langue à procédés accentuels positifs, à vocalisme dominant et à articulation des voyelles précise – interprète ainsi la réduction vocalique comme une substitution vocalique en remplaçant un timbre net par un autre timbre net. L’effort pour réaliser un timbre précis peut être renforcé par le désir de prouver à l’enseignant la bonne maîtrise des règles apprises (hypercorrection), ce qui peut entraîner un déplacement total de l’accent, y compris dans des cas où il devrait être final comme en français : Moskva -> *[maskva]. Il apparaît donc judicieux de renverser la hiérarchie des composantes pédagogiques en donnant la priorité à l’audition et non à la visualisation de la graphie.
Domaines
Linguistique
Origine : Fichiers produits par l'(les) auteur(s)