Entre injonctions à dire et à taire le corps. Les voies étroites de la reconnaissance littéraire pour les écrivaines tunisiennes
Résumé
A rebours d'une conception légitimiste de la réception et d'une représentation étatique de la censure, l'article montre que l'introduction du genre dans l'univers littéraire amène à penser les formes disséminées de la censure, y compris dans l'espace conjugal et familial. Une conception élargie de la réception et de la censure s'impose quand on introduit le genre comme catégorie analytique. Ainsi, la conjonction d'une censure disséminée avec les critères de reconnaissance des pairs conduit à l'éviction des écrivaines de la reconnaissance littéraire. L'imbrication de ces facteurs externes et internes à l'univers littéraire révèle la non neutralité des critères d'identification d'une bonne œuvre, et partant, la non neutralité du canon artistique. Parallèlement, l'article met en évidence les diverses stratégies (narratives, de présentation de soi, etc.) dont certaines écrivaines font usage pour contourner la double injonction pesant sur l'expression publique du corps et de la sexualité.