Les grands ensembles HLM : de l’emblème au stigmate.La rénovation urbaine comme fabrique de l’oubli
Résumé
Les grands ensembles HLM bâtis dans les années 1960 constituent les emblèmes de la volonté technocratique d’effacer la France « arriérée ». Cependant, ces monuments de la France « moderne » sont rapidement devenus à leur tour des repoussoirs. Fuis par les habitants qui en avaient les moyens, décriés par l’opinion publique, ils ont été tellement déconsidérés que les pouvoirs publics, après avoir beaucoup investi pour les « réhabiliter », se sont résignés dans les années 2000 à les « rénover », c'est-à-dire à les démolir. Avec cette politique, tout se passe comme si l’interventionnisme étatique se remobilisait 40 ans plus tard pour effacer ces cités des paysages urbains et, ce faisant, pour supprimer de la mémoire nationale ces témoignages d’un grand projet démiurgique ayant tourné au fiasco. Ainsi, les cités HLM peuvent être considérées comme les lieux d’une identité octroyée se voulant glorieuse, en rupture avec le passé, devenant en quelques décennies un cauchemar à oublier. Dès lors, nous nous posons cette question : la rénovation urbaine est-elle une fabrique de l’oubli ?