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Communication Dans Un Congrès Année : 2022

L’écocertification : une démarche en faveur de la préservation d’un patrimoine forestier mondial ? Réflexions à partir de l’exemple du Viêt Nam

Résumé

Lorsque la Convention pour la protection du patrimoine mondial est définie en 1972, elle reconnaît d’emblée l’existence d’un patrimoine mondial naturel, considérant qu’il importe de « concilier la conservation des sites culturels et celle des sites naturels », reprenant là une idée venue des États-Unis . Derrière cela, c’est une vision de la nature qui se répand, celle d’un bien hérité, commun à l’Humanité et qu’il importe de préserver pour les générations futures. On la retrouve quelques années plus tard dans la notion de développement durable, qui est mentionnée pour la première fois dans le rapport Brundtland (1987) et s’impose lors de la conférence de Rio. Celle-ci s’ouvre en 1992, « dans un contexte de psychose face à la menace de disparition radicale et rapide d’un des plus grands biomes forestiers du globe, la forêt tropicale » (Arnould, 1999). L’un des moyens d’action alors envisagé, pour préserver ce patrimoine naturel menacé, est l’écocertification (ibid. ; Tsayem Demaze et Fotsing, 2004 ; Kouna Eloundou et al., 2008). Elle marque le début de la mondialisation des questions environnementales et notamment forestières. Mais elle ne tarde pas à montrer ses limites et pour cause : il s’agit de distinguer le bois issu de forêts gérées durablement, d’abord pour répondre à la demande de consommateurs de pays du Nord (Arnould, 1999), de plus en plus soucieux de la préservation de l’environnement, quitte à imposer une idée de la nature et à se méprendre sur les enjeux locaux réels. Il faut dire que les forêts sont au centre d’une pluralité d’enjeux et d’une diversité de représentations qui rendent d’ailleurs problématique toute « option de […] patrimonialisation des forêts pour le compte de l’humanité [surtout] dans les territoires où les populations en dépendent encore étroitement » (Abanda Ngono, 2017). Dans la cas de l’écocertification, il en résulte des mesures « spectaculaires sur le plan symbolique » mais « quasiment inefficaces » car ignorant les causes de la déforestation (Arnould, 1999). Ainsi, les deux principaux labels, FSC et PEFC, se sont paradoxalement répandus surtout dans les pays du Nord (Tsayem Demaze, 2008 ; Kouna Eloundou et al., 2008 ; Iwanaga et al., 2019). Pourtant, loin d’être une « idée rebattue et dépassée » comme le présageait P. Arnould (1999), l’écocertification est aujourd’hui en plein essor dans certains pays tropicaux, en Asie du Sud-Est : le Viêt Nam est le pays qui y a enregistré la plus forte progression (+ 554 % entre 2012 et 2017 : Iwanaga et al., 2019). L’écocertification y est-elle un moyen de préserver ce patrimoine que constitue la forêt tropicale ? Après une discussion sur les enjeux et problématiques de l’écocertification et plus largement de la patrimonialisation de la forêt à l’échelle internationale, nous nous attarderons sur le cas vietnamien. Nous verrons que ce n’est finalement pas la forêt tropicale qui est concernée mais plutôt de « nouvelles forêts » (Arnoul, 2004) qui amènent à nous questionner sur nos représentations de la nature (Robert, 2021) : ce sont essentiellement des plantations d’acacias, dont l’essor est considérable au Viêt Nam depuis les années 1990 (ibid. ; Amat et al., 2008). Outre le rôle des ONG internationales (WWF, SNV, GIZ, JICA), certes appuyées par les autorités vietnamiennes (décision n° 1288/QD-TTg :Vietnam Forest Certification Scheme, 2018), il est à noter les motivations avant tout économiques des acteurs qui se tournent vers l’écocertification. Celle-ci s’est ainsi bien éloignée de son objectif initial, de préservation de la forêt tropicale, patrimoine mondial, par la lutte contre la déforestation : elle offre surtout une plus-value économique et la possibilité de vendre à l’étranger, même si elle concourt aussi à une prise de conscience environnementale (Iwanaga et al., 2019) et permet de développer une gestion plus ancrée dans la durabilité.
Fichier non déposé

Dates et versions

hal-03607215 , version 1 (13-03-2022)

Identifiants

  • HAL Id : hal-03607215 , version 1

Citer

Amélie Robert, Nghị Trần Hữu. L’écocertification : une démarche en faveur de la préservation d’un patrimoine forestier mondial ? Réflexions à partir de l’exemple du Viêt Nam. Journée d’étude du Groupe d’Histoire des Forêts françaises (GHFF) : Labels et patrimoines forestiers, Jan 2022, Charenton-le-Pont, France. ⟨hal-03607215⟩
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