Systèmes techniques et productions symboliques du mégalithisme funéraire de la façade atlantique entre Bretagne et Pays basque
Résumé
Sur la base de leur forme, de leur géologie, de leur état de surface ou de leur couleur naturelle, les parois mégalithiques montrent souvent au sein d’un même monument une certaine cohérence, voire une forme d’organisation sémantique, de sorte que s’esquisse une structuration originale de l’espace funéraire mégalithique appelée « codage symbolique ».
Dans plusieurs régions reconnues pour leur densité mégalithique allant de la Bretagne au Pays Basque (Val de Loire, Ruffécois, Quercy, Entre-deux-Mers, vallée de Mendive), chaque projet architectural mégalithique a été caractérisé, c’est-à-dire que l’assemblage de ces « grandes pierres » a été regardé à la fois comme une production symbolique et comme un système technique à part entière.
Par production symbolique, on entend toutes les natures de faits autres que techniques que sont la couleur géologique des parois minérales, leur état de surface, leur forme, l’axe de leur éclairement ou encore leur art pariétal. Par système technique, on entend la chaîne opératoire mégalithique mise en place pour produire les blocs, depuis les techniques d’acquisition jusqu’aux formes de transformation et d’utilisation. En s’appuyant sur les plans de répartition spatiale de ces deux natures de faits, il est possible d’identifier des effets d’oppositions ou d’associations, voire de valorisation de certaines parois, mettant en exergue les effets de scénographie de l’espace interne mégalithique.
Dans l’ensemble des régions et des monuments explorés, deux zones architecturales montrent un investissement particulier : l’entrée et la dalle de chevet. La dalle de chevet apparait souvent comme l’élément central de la chambre funéraire et s’impose au regard du visiteur par son unicité mise en scène grâce à son éclairement, sa morphologie, ses dimensions, son façonnage, ses gravures, ou ses formes naturelles remarquables comme les fossiles. L’entrée du monument est l’autre zone fortement investie et montre quelques régularités chromatiques entre le Val de Loire et l’estuaire de la Loire au niveau d’un choix récurrent orienté vers la couleur blanche.
Enfin, les effets de segmentation de l’espace sépulcral apparaissent comme une composante essentielle du codage symbolique où la couleur naturelle mais également l’éclairement, la rugosité ou la granulométrie des parois participent d’un véritable cloisonnement « virtuel » de l‘espace. Ce fractionnement correspond probablement à une différence de fonction au sein même de la chambre funéraire, ainsi qu’à un cheminement interne, où le codage de la paroi, exprimé par des « images » naturelles remarquables et rares, ne se livre que par étapes au sein d’un parcours imposé.