"Le biseau des baisers : Aragon godardisé"
Résumé
Les citations de Louis Aragon, omniprésentes dans le cinéma de Jean-Luc Godard, permettent de convoquer des images absentes, des "souvenirs brisés" qu’on ne saurait plus différencier d’un "présent vivant", le texte assurant leur présence paradoxale au sein du montage godardien, qui s’est sublimé au tournant du XXIe siècle en un geste profondément mélancolique, où l’art du collage cinématographique représente la tentative bouleversante de faire coexister – tenir ensemble – non seulement le texte et l’image, mais aussi le visible et l’invisible, ou le présent et le passé. Il s’agit donc là d’images spectrales ou, pour le dire avec Gilles Deleuze, d’images-cristal qui assurent la coalescence de l’actuel et du virtuel, et "sauvent l’honneur de tout le réel" : elles font mieux qu’honorer les morts qui hantent désormais tous les films de Godard – elles les ressuscitent.