L’habitat « non réglementaire », un impensé des politiques ou politique en soi ? Villes du Maghreb et du Liban
Résumé
Aujourd’hui, phénomène structurel des villes dans de nombreux pays du Sud, l’habitat non réglementaire recouvre une réalité diverse et mouvante qui se traduit notamment par des irrégularités juridiques à géométrie variable. Les politiques de régularisation achoppent, dans une grande majorité de cas, sur la sécurisation foncière et la légalisation. Les quartiers non réglementaires sont pour ainsi dire « maintenus » de fait dans leur statut et leur image. Dans les pays du Maghreb et au Liban, ils demeurent stigmatisés et représentés comme pauvres et marginaux par les pouvoirs publics, alors que leurs trajectoires indiquent des morceaux de ville qui se sont « banalisés » et ont développé de nombreuses ressources.
Les auteures cherchent à montrer dans cet article que les quartiers non réglementaires sont envisagés par les pouvoirs publics comme un dispositif de régulation sociale, politique et urbaine qui supplée aux limites des politiques en matière d’habitat ou à leur absence. Dans les cas abordés pour Alger comme pour Beyrouth, les mêmes tendances peuvent être observés dans dans plusieurs villes du Maghreb et du Machrek, toute mesure gardée, par ailleurs. Les pratiques des pouvoirs publics à l’égard des QNR, font apparaître l’aggravation des ségrégations socio-spatiales et des fractures territoriales, sans doute porteuses de conflits car elles occultent les revendications de justice des mouvements sociaux de ces dernières années.