Usages et subversions de la microfinance
Résumé
Tantôt portée aux nues, tantôt vouée aux gémonies, la microfinance fait
l'objet de débats passionnés. Certains l'encensent pour son potentiel de
transformation des pauvres en entrepreneurs et consommateurs créatifs et
responsables (Attali, 2006 ; Collins et al. 2009 ; Yunus, 2007), en particulier
les femmes. D'autres, en revanche, considèrent la microfinance d'abord et
avant tout comme une nouvelle niche pour le capitalisme et une justification
du néolibéralisme, comme un catalyseur et un produit de la globalisation et
de ses méfaits (Falquet, 2008 ; Fernando, 2006).
Reprenant huit ans de recherche en Inde du Sud (Tamil Nadu), je me
propose ici d'étudier non pas les discours de la microfinance mais ses usages
au quotidien et ce qu'ils révèlent concernant les dynamiques
socioéconomiques et politiques en cours. La microfinance est un outil
"globalisé", au sens où ses modalités sont dictées par des normes
uniformisées et standardisées édictées par un nombre très restreint
d'organisations, de fondations