Repenser l'innovation. Connaître et gérer le legs du logement social, expérimental et innovant de la décennie 1968-1978 - Archive ouverte HAL Accéder directement au contenu
Rapport (Rapport De Recherche) Année : 2020

Repenser l'innovation. Connaître et gérer le legs du logement social, expérimental et innovant de la décennie 1968-1978

Résumé

Au tournant des années 1960-70, en pleine période de construction d’un habitat de masse, l’État, confronté à l’échec de la forme urbaine du grand ensemble, œuvre au développement d’un véritable laboratoire de l’habitat en misant sur le renouveau de la qualité du cadre de vie des Français. Dès 1971, un important effort de recherches pour susciter l’innovation dans les techniques et les formes de l’habitat se met en place à travers le Plan Construction. L’innovation, considérée comme source de croissance, devient la nouvelle doxa pour la puissance publique. Mais, ce changement est aussi souhaité par le milieu des architectes qui remettent en cause les préceptes de la modernité. Le contexte culturel est celui d’une révision critique qui conduit la profession à s’interroger sur le renouvellement typologique du logement. Cette envie commune mais différente de « faire mieux », « d’inventer, d’innover », à déterminer deux corpus différents : l’habitat innovant incité par les pouvoirs publics et celui entrepris par les architectes sans injonction particulière. Le premier corpus, relève d’une innovation planifiée par l’État, fondé sur un optimisme technique, porté par le Plan Construction dont l’ambition était de « renouveler la construction et l’ouvrir à l’innovation ». Parmi les incitations et concours que cet organisme a créés, le concours des Modèles-Innovations s’inscrit dans la voie de l’industrialisation. Les recherches des architectes, entreprises et BET ont porté sur le tridimensionnel, les systèmes ouverts, l’habitat évolutif. Ce concours a donc plutôt produit une catégorie d’architectures-systèmes dominée par l’ingénierie et fondée sur le principe d’un modèle reproductible. Il s’agit d’opérations réalisées en nombre à partir de la définition d’un modèle, aboutissant à des collectifs sériels. Ce corpus est investi par les chercheurs de l’ENSAP de Lille dont l’apport essentiel de connaissance a consisté à élaborer l’inventaire des opérations Modèles Innovation dans la région des Hauts de France (84 opérations utilisant 15 modèles). Ce travail a été mené en lien avec le CAUE et la DRAC Hauts de France afin de proposer une évaluation patrimoniale au regard du nouveau Label Architecture Contemporaine Remarquable. Cet inventaire sert ensuite de base aux quatre autres approches scientifiques des chercheurs articulées à la pédagogie : une étude des composants du second œuvre dans une perspective de « transformabilité » de ces ensembles, une hypothèse de rénovation énergétique pour un seul modèle par une analyse de systèmes dynamiques (à savoir la variable d’occupation), une étude du paysage des Modèles Innovation à travers six études de cas (permettant d’exclure l’idée d’un modèle paysager) et une approche conceptuelle de la transformation de trois types : habitat intermédiaire, individuel groupé et habitat pyramidal. Le second corpus relève d’une innovation spontanément initiée par les architectes, fondée sur le renouvellement formel et typologique ayant abouti à l’habitat intermédiaire. Partant de la cellule comme unité de base, c’est une typologie d’habitat qui repose sur le principe de la combinatoire, de l’agrégation compacte de cellules. Ni collectif, ni individuel, c’est un habitat qui tente « d’individualiser le collectif ou de collectiviser l’individuel » citant Christian Moley, qui peut prendre des formes diverses : l’individuel groupé, le dispositif pyramidal à gradins jusqu’au collectif horizontal. Ce corpus a été investi par l’ENSA de Marseille sur la région méditerranéenne, mais aussi au-delà. Le thème de l’habitat intermédiaire étant plus difficile à circonscrire que celui des Modèles Innovations, ce corpus n’a pas fait l’objet d’un inventaire systématique et exhaustif sur l’ensemble de la région Sud-PACA. Le choix des opérations s’est réalisé sur la base d’une classification par type d’assemblages : volumétrique, tissulaire, linéaire, en grappe, et donc sur le principe de l’échantillon. Au total 42 opérations d’habitat intermédiaire, presque toutes locales, ont été étudiées dans le cadre de la pédagogie. C’est sur cette base d’analyses d’opérations locales, comparées à l’ensemble des réflexions et expériences les plus saillantes de la période (celles retenues comme telles par les revues professionnelles et l’historiographie), que s’ouvre la recherche élaborée à Marseille, proposant une amorce d’histoire de l’habitat intermédiaire. Après un état de l’art du concept dans le milieu de la critique architecturale, vient une analyse des acteurs engagés dans la production de l’habitat intermédiaire, tant du point de vue des architectes (étude prosopographique) que des maîtres d’ouvrages (focus sur deux commanditaires, la SCIC et l’OCIL). Puis une analyse de l’évolution des modèles d’habitat intermédiaire depuis les années 1950 démontre l’antériorité des propositions spontanées des architectes sur celles promues par l’État. Une méthodologie d’analyse typologique plus fine que celle proposée dans les revues d’architecture (volumétrique, tissulaire, linéaire, en grappe) est ensuite testée sur l’œuvre de Roland Simounet et se prolonge par une approche comparative de la production de trois architectes engagés dans le type intermédiaire, Roland Simounet, Émile Aillaud et Georges Candilis, qui permet de dégager les qualités socio-spatiales de l’habitat intermédiaire selon les couples d’opposition : intimité/urbanité, répétition/diversité, complétude/évolutivité. Après cette contribution à l’histoire de l’habitat intermédiaire, la question de son actualisation clôture l’apport de l’ENSA Marseille à cette recherche. D’abord sont présentés les résultats de la collaboration recherche/pédagogie quant aux promesses de transformabilité de cet habitat spécifique. Les outils diagnostics de l’analyse énergétique (simulation thermique dynamique et thermographie infrarouge) ont été testés sur certaines opérations interrogeant le comportement d’usage dans le cadre du confort d’été et d’hiver. La réalité augmentée a quant à elle été mise au service de la représentation des actualisations possibles du genre intermédiaire. Pour finir, une ouverture vers l’opérationnel a permis, à l’instar de l’ENSAP de Lille, d’aborder la question de la patrimonialisation de cet habitat intermédiaire en région Sud-PACA. Une sélection de 21 opérations a été soumise à expertise à la DRAC PACA au titre du label Architecture Contemporaine Remarquable. Enfin, une tentative d’application de recommandations architecturales et techniques sur quatre opérations soumises à expertise (une pour chaque type d’assemblage initiaux) confirme les multiples qualités de l’intermédiaire dans son rapport au site, ses articulations public/privé et dedans/dehors, qui font encore démonstration au XXIe siècle.
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Origine : Fichiers produits par l'(les) auteur(s)

Dates et versions

hal-03126706 , version 1 (20-12-2021)

Identifiants

  • HAL Id : hal-03126706 , version 1

Citer

Ana Bela De Araujo, Richard Klein. Repenser l'innovation. Connaître et gérer le legs du logement social, expérimental et innovant de la décennie 1968-1978. [Rapport de recherche] ArchiXX-2020-ARA, Ecole Nationale Supérieure d'Architecture de Marseille-Luminy; Laboratoire INAMA; Ecole Nationale Supérieure d'Architecture et de Paysage de Lille; Laboratoire d'architecture conception territoire histoire (LACTH); Bureau de la recherche architecturale, urbaine et paysagère (BRAUP). 2020. ⟨hal-03126706⟩
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