Étude SOCLIM : Savoirs climatiques et gestion de l’eau en Rhin-Meuse <i>Le cas du Massif des Vosges</i> - Archive ouverte HAL Accéder directement au contenu
Rapport (Rapport De Recherche) Année : 2020

Étude SOCLIM : Savoirs climatiques et gestion de l’eau en Rhin-Meuse Le cas du Massif des Vosges

Résumé

La problématique du changement climatique s’est d’abord construite, scientifiquement et politiquement, à l’échelle globale. Depuis les années 2000 et surtout 2010, on observe un renforcement de la place de l’adaptation associée à une demande de prévision des changements climatiques au niveau régional et à la promotion d’une science davantage dédiée à des utilisateurs locaux. La territorialisation du changement climatique s’incarne, en particulier en France, dans la production de politiques d’atténuation et d’adaptation au niveau national, qui sont ensuite déclinées localement. Les efforts de « climatisation » des politiques de l’eau concernent aujourd’hui en particulier la planification décidée par les comités de bassin (SDAGE) et mise en œuvre par les Agences de l’eau (programmes d’intervention). Dans ces processus, l’action publique accorde une place importante au développement de connaissances et à la maîtrise des incertitudes, tous deux considérés comme des conditions nécessaires à la conception et mise en œuvre des politiques d’adaptation localement. Aujourd’hui, en Rhin-Meuse, plusieurs résultats d’études sont disponibles. Ils fournissent des ordres de grandeur des impacts et de l’évolution future des risques d’inondation et d’étiage. Quel rôle conférer alors à ces savoirs ? Quels usages en sont faits ? Plus largement, comment l’action publique locale conçoit les relations entre changement climatique et gestion de l’eau ? L’étude SOCLIM réalisée par l’UMR GESTE, avec la contribution du LOTERR et financée par l’Agence de l’eau Rhin-Meuse (2018-2020) traite de ces questions. L’analyse est menée à l’échelle du district Rhin-Meuse et de communes ou intercommunalités du massif des Vosges. Le sud du massif connait en effet des problèmes récurrents de sécheresses qui impactent l’approvisionnement en eau brute pour la production d’eau potable. Il fait aussi face à une baisse de la durée moyenne d’enneigement ces dernières décennies. L’enquête s’est fondée sur une analyse des documents d’action publique à différentes échelles, et sur 35 entretiens semi-directifs auprès d’acteurs qui produisent des études ou les commanditent, auprès d’acteurs impliqués dans les politiques de l’eau et la gestion des services d’eau ou de stations de ski. L’analyse des pratiques de production de données et de modélisation sur le climat et l’hydrologie montre qu’elles sont à la croisée d’enjeux scientifiques et politiques. La question des incertitudes est certes inhérente à ces pratiques, mais elle a aussi acquis une importance nouvelle avec l’évaluation du changement climatique et de ses effets. Certaines incertitudes sont actuellement très investies (l’état initial du système, la descente d’échelle, la représentation de la pluie et des extrêmes hydrologiques). D’autres en revanche sont émergentes (usages de l’eau, végétation et usages des sols). Si les résultats s’avèrent très dépendants des scénarios d’émissions de gaz à effet de serre choisis, la considération d’une pluralité de scénarios, et donc d’une gamme de futurs possibles contrastée, n’est pourtant pas une pratique largement répandue. Par ailleurs, si les modélisations permettent de dire que cela va évoluer et dans quel sens, ils ne peuvent pas non plus, à eux seuls, définir le sens politique des problèmes étant donnée la complexité des interactions entre dimensions humaines, sociales et naturelles qui contribuent à façonner l’avenir, et l’importance des antagonismes en jeu. L’analyse menée dans le massif des Vosges montre qu’il y a bien des signaux à la fois perçus, expérimentés et objectivés d’un changement du climat localement. Elle montre aussi qu’on a essentiellement affaire à une adaptation « par ajustement technique », qui vise à sécuriser ou à augmenter la disponibilité en eau ou en neige. Les solutions techniques portent une promesse, celle de pouvoir faire l’économie de négociations complexes et politiquement risquées pour penser, mettre en œuvre ou accompagner la sobriété et les transitions, rediscuter voire interdire certains usages de l’eau, identifier les perdants et concevoir des compensations. Ces solutions techniques peuvent générer de nouvelles impasses, parce que les effets du changement climatique sur les températures et la pluviométrie s’intensifient, ou encore parce qu’une nouvelle offre en eau ou en neige stimule le plus souvent de nouveaux usages. Mais ces questions n’ont pas pu être traitées jusqu’à aujourd’hui dans les initiatives de climatisation des politiques locales d’aménagement des territoires. Pour enrôler les acteurs locaux et susciter l’adhésion en faveur d’une gouvernance territorialisée de l’adaptation au changement climatique, ces initiatives se sont appuyées sur des dispositifs participatifs qui ont produit des consensus mous et évacué les dissensus.
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Dates et versions

hal-02998708 , version 1 (10-11-2020)

Identifiants

  • HAL Id : hal-02998708 , version 1

Citer

Sophie Liziard, Sara Fernandez, Gilles Drogue, Clément Bernard. Étude SOCLIM : Savoirs climatiques et gestion de l’eau en Rhin-Meuse Le cas du Massif des Vosges : Rapport final. [Rapport de recherche] UMR GESTE - Gestion Territoriale de l'Eau et de l'environnement; Engees; INRAE; LOTERR. 2020. ⟨hal-02998708⟩
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