H. and E. E. , Et tel autre, plus concis : « Dès que vous vous occupez des finances, tout passe par vous ». Le cas des administrateurs civils amène ainsi à nuancer la distinction entre administrations « de gestion » et « d'état-major » 26 qui, globalement bien assurée, n'est pas toujours claire : en l'espèce, les administrateurs civils « budgétaires » des ministères participent de tâches stratégiques d'état-major tout en appartenant à des directions « de moyens », typiquement gestionnaires. Ainsi est-il patent que « quand on veut faire carrière, il vaut mieux s'occuper des finances, ce n'est pas folichon tous jours, mais vous êtes incontournable. Même à la direction du Budget, quel est le poste le plus recherché ? Celui de chef du bureau de la synthèse budgétaire ! Parce qu'on voit le directeur, le cabinet, on suit le ministre au Parlement

E. X. C'est-c.-;-h and . ;. Déf, Personnel-Fi). Parmi ces structures centrales qui forment le noyau des « administrations d'état-major », l'on en peut citer quatre, par ordre croissant d'efficacité : le Commissariat général du Plan, signalé pour mémoire compte tenu de sa disparition-transformation mais qui avait permis, dans les années 1960 à 1980, à plusieurs administrateurs civils longtemps chargés de mission de devenir SGAR puis préfets, ou d'être intégrés à la Cour des comptes. Deuxième structure, elle aussi en perte de vitesse, mais dans une moindre mesure, le CIRI (Comité interministériel de restructuration industrielle), instance décisionnelle-clé en matière de financement et de pilotage de ce qu'il reste des politiques industrielles, est aux mains du Trésor. Il fut et reste encore intéressant d'y travailler pour de jeunes administrateurs civils désireux de tenter une mobilité au Trésor, vite suivie d'un « pantouflage » en entreprise. Le SGAE (Secrétariat général des affaires européennes, ex-SGCI) est bien plus central : ce service du Premier ministre a pour mission de centraliser la communication avec notre Représentation permanente auprès de l'UE et de veiller à la coordination interministérielle et aux arbitrages concernant les positions officielles de la France dans les négociations bruxelloises. En relation constante avec tous les ministères, travaillant pour Matignon sur tous les sujets-clé, les « chefs de secteurs » mis à disposition pour quatre ans par leur ministère acquièrent vite au SGAE une autre dimension que celle de l'administrateur ordinaire, celle d'un « généraliste » polyvalent 27 . Comme le remarquait son secrétaire général adjoint d'alors, Ralph Dassa (ENA Interne 1983), « lorsque les agents retournent dans leur ministère d'origine, cette expérience est très valorisante pour leur carrière. Ils ont une excellente vue de la manière dont les décisions se prennent, du fonctionnement des cabinets ministériels, est revenu chargé de la sous-direction du budget ici, est passé sous-directeur à huit années pétantes, puis sous-directeur aux personnels civils

J. Quermonne, L. Etat, P. , and L. Seuil, , pp.29-51, 1991.

J. Eymeri, « Définir 'la position de la France' dans l'Union européenne. La médiation interministérielle des généralistes du SGCI, Le gouvernement du compromis. Courtiers et généralistes dans l'action politique, pp.149-175, 2002.

L. Cité-par, . Gourret, S. Le, ». Ne-cesse-de-s'amplifier, and S. Public, Dès lors, le passage en cabinet n'est pas toujours et pour tous un accélérateur de carrière, bien qu'il offre à quelques heureux élus des trajectoires météoriques, avec nomination comme directeur d'administration centrale à ENA + 5, au sortir de deux années en cabinet, sans avoir été chef de bureau ni avoir même l'ancienneté requise de 8 ans pour être nommé sous-directeur. De même voit-on certains obtenir une nomination au tour extérieur dans un grand corps et « remonter » ainsi de quarante places leur classement de sortie de l'ENA. Mais pour que le passage en cabinet fonctionne ainsi comme catapulte, note un interviewé, « il faut avoir une vraie proximité avec le ministre, soit au départ soit l'acquérir, parce que si vous êtes seulement un technique, on en a vus pas mal qui redescendent dans l'administration, c'est un passage de leur carrière, c'est tout ! ». Il est clair en effet qu'un ministre ne place pas tout membre de son cabinet, à ce seul motif, à le tête d'une direction ou d'une préfecture et ne s'échine pas auprès « du Château » pour obtenir à chacun une nomination au Conseil d'Etat ou à la Cour des comptes : il faut pour bénéficier de telles retombées être un « proche » du ministre, proximité très aléatoire à conquérir puis à conserver, et à laquelle bien des membres de cabinet n'atteignent jamais, contrairement à l'impression que l'on en a de l'extérieur. Dans la plupart des cas, la « sortie-cabinet » se traduit plutôt pour les intéressés par un gain de temps de quelques années, qui les voit être nommés plus jeunes que leurs camarades de promotion dans de plus belles sous-directions, que les ministres, ces derniers ne choisissant guère plus de trois à cinq de leurs nombreux collaborateurs, aux dires de tous les interviewés, vol.47, p.27, 1997.

. De-fait--et-la-métaphore-de-l'«-accélérateur, Une expérience de cabinet réussie est celle qui fait changer l'individu de catégorie : tous les interviewés qui y sont passés l'attestent, « on ne voit plus les problèmes de la même manière », « on voit le processus de décision jusqu'au bout », « on ne travaille plus jamais pareil après parce qu'on sait comment pense le politique, on sait ce que veut un ministre ». C'est pourquoi, résume un directeur chevronné, « pour un administrateur civil qui veut progresser et exercer un jour des fonctions directoriales, c'est fondamental d'avoir fait du cabinet ». A l'instar de l'ENA elle-même, le cabinet est ainsi un lieu de formation-sélection par forçage où tout l'enjeu consiste à prouver son excellence en situation d'urgence extrême : les plus adaptés y gagnent leur droit d'entrée dans la catégorie des « directorables » et « préfectables », comme disent les intéressés, dans le « vivier de l'encadrement dirigeant », disent les spécialistes de GRH. C'est ainsi que plus de la moitié des directeurs d'administration centrale ont eu au préalable une expérience de cabinet, cette proportion montant aux quatre cinquièmes si l'on resserre la focale d'observation sur les plus beaux postes directoriaux. * Parvenu au terme de ces réflexions sur les carrières des administrateurs civils issus de l'ENA, l'on se trouve en fin de compte renvoyé à la tension logique existant entre ce que cette étude monographique révèle de singularités propres aux, est en cela une gêne pour penser les effets d'un passage en cabinet -l'effet essentiel de cette expérience n'est pas tant que la carrière aille plus vite (quel que soit l'indicateur de mesure, ancienneté ou âge) mais que ses bénéficiaires en sortent transfigurés, objectivement et subjectivement, à leurs propres yeux comme dans le regard des collègues