La dimension anthropologique et citoyenne du métier d'ingénieur
Résumé
Dans La Condition de l'homme moderne, Hannah Arendt déclare en 1961 : « L'époque moderne s'accompagne de la glorification théorique du travail et elle arrive en fait à transformer la société tout entière en une société de travailleurs. Le souhait se réalise donc, comme dans les contes de fées, au moment où il ne peut que mystifier. C'est une société de travailleurs que l'on va délivrer des chaînes du travail, et cette société ne sait plus rien des activités plus hautes et plus enrichissantes pour lesquelles il vaudrait la peine de gagner cette liberté. » Hannah Arendt écrit ces lignes au moment où la montée de l'automatisation promet une délivrance prochaine du labeur, de la peine physique. Un peu plus de cinquante ans plus tard, nous voyons que cet allègement de la peine au travail a engendré d'autres peines, dont, aux deux extrêmes, celle d'être au chômage et celle d'être en souffrance par surcroît de travail. Ceci est assez symptomatique des peines modernes qui mènent la vie dure au mythe du « progrès » : les exigences en matière de qualification, de productivité, de rentabilité économique ont fait rentrer par la fenêtre un « labeur » qu'on croyait sorti par la porte. Mais ce labeur n'a plus les mêmes caractéristiques que la seule peine physique : il est plus sociétal, plus psychologique ; il s'immisce dans les mécanismes du pouvoir, dans le ferraillage quotidien qui permet à une entreprise de perdurer, de trouver sa place, ses financements et même de réussir.
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