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Chapitre D'ouvrage Année : 2018

Les noms d'humains en -phobe

Bruno Oberle
  • Fonction : Auteur
  • PersonId : 1064737

Résumé

Constructions néoclassiques récentes, formées avec un élément d'origine grecque et d'un élément d'origine soit classique soit française, les NH-phobe se caractérisent d'abord par une grande productivité, avec de nombreuses créations, que les éléments soient « triviaux » (araignée-phobe) ou, au contraire, très « recherchés » (blemmophobe). Face aux catégorisations sémantiques données par les dictionnaires, qui répartissent les NH-phobe entre peur, haine et aversion, il convient de faire preuve de prudence: non seulement le sens de ‑phobe ne semble pas stabilisé (anglophobe pourra aussi bien désigner quelqu'un qui hait les Anglais, que, dans certains contextes, quelqu'un qui ne parle tout simplement pas anglais), mais surtout les deux principaux sens (peur et haine) semblent cohabiter dans l'esprit des locuteurs, qui se sentent parfois obligés de préciser le sens qu'ils donnent à ‑phobe, quand ils ne jouent pas sur la polysémie de l'élément pour masquer leur haine. L'analyse comparative des quatre discours représentés dans notre corpus a mis en évidence certaines contraintes pesant sur l'usage des NH-phobe. Ceux-ci sont ainsi beaucoup plus fréquents dans la langue informelle des sous-titres, alors que les documents formels et administratifs privilégient l'usage de l'adjectif et n'en contiennent presque aucun. La distribution lexicale varie également selon le discours: les films et les séries s'intéressent surtout aux homophobes, les députés européens aux xénophobes et la presse, les forums et les blogs aux deux à la fois. D'autres phénomènes ont été révélés par une analyse plus fine des propriétés syntaxiques et sémantiques des NH-phobe; par exemple l'opposition entre un usage générique, pluriel, au genre indéterminé dans les débats parlementaires européens, et un usage plus spécifique, singulier, avec plus d'expansions, dans les dialogues des films et séries; mais aussi la peur (claustrophobe, arachnophobe) plus souvent associée aux femmes qu'aux hommes; ou encore l'usage fréquent des NH-phobe comme insultes. Si nos remarques ont surtout été descriptives, nous avons essayé d'offrir une vue d'ensemble de ces NH, non seulement en tant que constructions (notre étude qualitative), mais aussi en tant que composés qui s'inscrivent dans des usages spécifiques (notre étude quantitative). Plusieurs des phénomènes que nous avons mis en avant mériteraient une analyse plus approfondie, notamment celui de la polysémie de l'élément ‑phobe et celui de la corrélation entre certains phénomènes syntaxiques ou sémantiques et le type de discours. De plus, certaines de ces propriétés, en faisant l'objet d'une étude plus poussée, pourraient servir de base à une sous-catégorisation des NH-phobe, ce qui permettrait, à terme, de les intégrer dans des classifications plus larges des noms d'humains, comme celles de Gross (2011), El Chérif (2011) ou Schnedecker (2015). Enfin, il conviendrait d'envisager l'étude contrastive des NH-phobe et d'autres composés néoclassiques nominaux, tels que ceux formés, par exemple, à partir de ‑phile, ‑mane ou ‑graphe.

Domaines

Linguistique
Fichier non déposé

Dates et versions

hal-02486687 , version 1 (21-02-2020)

Identifiants

  • HAL Id : hal-02486687 , version 1

Citer

Bruno Oberle. Les noms d'humains en -phobe. Nouvelles approches en sémantique lexicale: les noms d'humains (théorie, méthodologie, classification), De Gruyter, 2018, 978-3-11-058616-9. ⟨hal-02486687⟩

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