Pour une éthique de la proximité à l'ère numérique
Résumé
Je commencerai par énoncer une conviction selon laquelle plus nos espaces de vie sociale, professionnelle et politique sont investis par les innovations numériques, plus nous devons nous rendre attentifs aux vertus de la proximité physique et sensible. Il s'agit par là d'assumer une prise de recul à l'heure où les éloges en faveur de la numérisation ne manquent pas. Nous pouvons ainsi notamment lire sous la plume de Pierre Lévy la description d'un " idéal de relation humaine déterritorialisée, transversale, libre ". Des modes d'être en réseau permettent en effet l'apparition de nouvelles formes de solidarité et de mobilisation sociale. Les technologies de l'information et de la communication transforment bel et bien les modalités de l'action collective : elles favorisent des formes plus spontanées de participation politique qui passent, par exemple, par des pétitions en ligne ou de plateformes dédiées à la participation citoyenne (à l'échelle d'une ville, d'un quartier, etc.). Les médiations numériques rendent possible l'expression de la subjectivité des individus, en générant des dynamiques de partage et de mise en commun de compétences, de connaissances, d'affinités, d'expériences sensibles : " Une communauté virtuelle se construit sur des affinités d'intérêts, de connaissances, sur le partage de projets, dans un processus de coopération ou d'échange, et cela indépendamment des proximités géographiques et des appartenances institutionnelles ". Toutefois, si la dématérialisation engendre des modes d'échange plus flexibles et ubiquitaires, elle contribue en même temps à accentuer des contradictions très spécifiques d'un point de vue éthique...