Développer une stratégie d'inclusion des femmes dans les filières TIC des écoles d'ingénierie de la HES-SO

Chantal Morley (1, 2) , Isabelle Collet (3)

1 LITEM - Laboratoire en Innovation, Technologies, Economie et Management (EA 7363)
2 IMT-BS - DSI - Département Systèmes d'Information
3 UNIGE - Université de Genève = University of Geneva

La Haute École spécialisée de Suisse occidentale (HES-SO) est constituée d'un réseau d'écoles dans les cantons de Suisse romande qui offrent des titres de bachelor et master HES axées sur la pratique. Pour intégrer ces écoles, les étudiants suivent au préalable un titre de formation professionnelle de l'enseignement secondaire supérieur (l'école des métiers). Quatre de ces écoles comportent une filière d'informatique, dans lesquelles les femmes sont moins de 8%, encore plus bas que la moyenne européenne (Collet, 2011). Nous avons travaillé sur la question de l'inclusion des femmes dans les filières d'informatique en Bachelor dans les HES-SO. Notre cadre de recherche s'appuie sur le concept d'inclusion, telle que l'utilise la littérature internationale, proche d'une problématique d'inclusion sociale (Freiler, 2001). L'échantillon est composé de 20 étudiant-es (10 femmes et 10 hommes) de 2e et 3e année de Bachelor auprès desquels nous avons mené des entretiens semi-directifs. Ils étaient centrés sur les 4 dimensions de l'inclusion : l'espace au sens de la géographie sociale, le développement lié à la confiance en soi et à l'efficacité personnelle, les relations, soit la possibilité de s'intégrer positivement dans un groupe, le pouvoir ou l'empowerment (Morley & Collet, 2017). À noter qu'en interrogeant 10 femmes, nous avons quasiment épuisé le vivier des étudiantes de 2e et 3e année des HES-SO. L'analyse a été menée à l'aide de l'outil Nvivo10, logiciel de support pour l'analyse qualitative d'entretiens. Les résultats de l'étude nous montrent que manière superficielle, les étudiant-es ne rapportent pas de harcèlement ou de situation directement hostile envers les étudiantes dans les écoles, contrairement à certaines situations rencontrées préalablement dans les écoles des métiers, dans lequel les garçons seraient encore " immatures " (Collet, 2014) et se comporteraient de manière sexiste, d'une façon jugée inévitable, d'autant plus qu'elle se produit dans une certaine indifférence institutionnelle. Ensuite, la Haute école est très peu connue des élèves de 15 ans. En s'orientant vers l'école des métiers, elles et ils ignorent pour beaucoup qu'il existe par la suite un enseignement tertiaire professionnel et aucune information ne leur est délivrée à ce moment sur ce sujet, au-delà du choix apprentissage / voie générale. Ce n'est qu'une fois en passe d'être diplômé de l'école des métiers qu'elles et ils verront des présentations de la HES-SO et seront conviés par exemple à des journées de présentation. Les filles qui ont choisi l'apprentissage racontent qu'elles ont été fortement découragées de le faire par des enseignant-es qui insistaient pour les maintenir dans la voie générale, afin de leur permettre de faire des études longues. Si la HES-SO a bien un discours institutionnel en faveur de l'inclusion des filles, nous notons tout de même que la culture de l'école est alignée sur des standards de la masculinité hégémonique (Connell, 2014). Cette culture masculine est jugée normale et même attendue par les étudiants comme par les étudiantes et n'est pas mise en question, ni même discutée. Ainsi, quand des propos ou des attitudes sexistes apparaissent, soit ils ne sont pas reconnus pour ce qu'ils sont, soit ils sont perçus comme un épiphénomène regrettable que les étudiantes doivent apprendre à gérer.

Mots clés: Genre; Genre et technologie d’information

Domaines: Etudes sur le genre

Chantal Morley, Isabelle Collet. Développer une stratégie d'inclusion des femmes dans les filières TIC des écoles d'ingénierie de la HES-SO. La fabrique du genre dans l’enseignement professionnel, Université de Poitiers; CPER INSECT, Mar 2019, Poitiers, France. ⟨hal-02282487⟩