, On peut s'interroger sur la finalité de ce roman, miroir du monde contemporain sur bien des points comme cette difficile cohabitation entre les sexes, doublée ici d'une confrontation intéressante entre les cultures. Jean-Philippe Toussaint complexifie ses héros en les chargeant volontairement des attributs inversés du genre

, Si dans le meurtre final de la fleur, le narrateur semble reprendre le pouvoir et avoir le dernier mot (146), la valeur caricaturale de cet acte sublimatoire n'en est que plus inconsistante, apparemment ridicule, et ne fait que confirmer l'impuissance réelle d'un masculin acculé à l'exutoire. Entre une féminité qui singe le masculin, et une virilité défaillante traversée de féminin et condamnée à se satisfaire d'expédients dérisoires (pour poétiques qu'ils soient), Toussaint ne cesse de rejouer les modalités d'un mal-être nouveau, Si Marie incarne une certaine revanche des femmes dans les deux sphères traditionnellement interdites à l'initiative féminine -le professionnel et le sexuel -, elle s'approprie parfois sans nuance les exigences du masculin

, Ce n'est que sur le mode ludique qu'il se sort de cet effondrement délibéré des catégories de genre : s'il se plaît à redistribuer les cartes du jeu social, il laisse intelligemment ses lecteurs sur le fil du rasoir, sur une incertitude savoureuse, un inachèvement nécessaire, qui sont les seules issues de l'oeuvre littéraire. * -Toutes les références renvoient à l'édition 2014 de Faire l'amour, Editions de minuit, n° 61, S'il prend tous les clichés à rebours, l'auteur ne gratifie pour autant aucun parti d'une suprématie idéologique : il laisse ses deux héros comme deux enfants encore immatures préfigurant une humanité nouvelle et encore incertaine, vol.54, 2011.