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Chapitre D'ouvrage Année : 2019

Vivre sous pression dans la biosphère profonde

Résumé

Philippe Oger, Microbiologie, Adaptation et Pathogénie (MAP, Lyon) Les organismes adaptés à la vie dans les profondeurs terrestres ont développé des mécanismes adaptatifs leur permettant de résister à des conditions extrêmes de pression et de température. L'étude du génome des archées Thermococcales éclaire certains de ces mécanismes. La biosphère profonde regroupe un ensemble varié d'environnements localisés en profondeur dans les océans, sous le plancher océanique et dans le sous-sol. Là, les conditions de température et de pression hydrostatique augmentent avec la profondeur pour atteindre des valeurs qui inhibent la croissance des organismes de surface, dits piézosensibles (Fig.1b). En effet, la pression hydrostatique impacte de nombreuses macromolécules (protéines, lipides …) et réduit leur fonctionnalité, en inhibant, par exemple, le cycle cellulaire des organismes piézosensibles. En revanche, certains organismes de la biosphère profonde ont besoin de conditions extrêmes de pression hydrostatique pour croître, ils sont appelés piézophiles. Trois hypothèses ont été proposées pour expliquer l'adaptation à des valeurs élevées de pression hydrostatique : 1) l'existence de gènes spécifiques aux piézophiles et absents des organismes piézosensibles; 2) la modification structurale des protéines capables de fonctionner à ces valeurs élevées de pression hydrostatique ; et 3) l'augmentation du niveau d'expression des gènes pour compenser la perte de fonctionnalité dans ces conditions de pression hydrostatique élevé. Ces différentes hypothèses ont été testées en déterminant la séquence complète du génome de plusieurs archées piézophiles de la famille des Thermococcales. L'archée Thermococcus barophilus Ch5 a été isolée à 3 000 m de profondeur au niveau du site Logatchev sur la ride Médio-Atlantique. La comparaison de son génome avec ceux d'autres organismes connus montre que l'existence de gènes présents uniquement chez les piézophiles peut être écartée. Cependant, plusieurs spécificités des archées piézophiles sont à souligner. La première concerne la duplication de plusieurs fonctions associées à la membrane, et notamment chez l'archée Ch5 : 1) la duplication des gènes de synthèse des flagelles, qui permettent à la cellule de se déplacer, et 2) la multiplication des gènes de synthèse de protéines des chaînes respiratoires (5 au total), qui permettent à la cellule d'obtenir l'énergie nécessaire pour sa croissance. Ces protéines des chaînes respiratoires sont exprimées de manière différentielle en fonction de la pression hydrostatique, avec une epxression des chaînes Mbx à haute pression et Mbh à basse pression La deuxième particularité des organismes piézophiles des systèmes hydrothermaux concerne leur capacité à utiliser des sources de carbones inorganiques, telles que le monoxyde de carbone (CO) ou l'acide formique (CH 2 O 2) pour leur croissance. Dans les systèmes hydrothermaux, ces molécules sont disponibles en quantité suffisante pour soutenir la croissance des cellules. Il est donc probable que les duplications de gènes et activités métaboliques particulières permettent à l'archée Ch5 un meilleur accès aux ressources du milieu et une meilleure réponse aux contraintes liées aux valeurs élevées de pression hydrostatique. Le lien causal avec une éventuelle adaptation aux valeurs élevées de pression hydrostatique reste cependant à démontrer formellement.
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Origine : Fichiers produits par l'(les) auteur(s)

Dates et versions

hal-02122323 , version 1 (18-11-2020)

Identifiants

  • HAL Id : hal-02122323 , version 1

Citer

Philippe Oger. Vivre sous pression dans la biosphère profonde. 101 secrets de l'ADN, 4, CNRS Editions, pp.151-153, 2019, 9782271123237. ⟨hal-02122323⟩
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