Étude physico-chimique de décors dits de ligne noire de céramiques architecturales au sein du monde islamique (XIVe-XVIIIe s.)
Résumé
Les premiers siècles de la civilisation islamique furent marqués par des développements technologiques majeurs nés d’intenses expérimentations techniques et de recherches esthétiques. Dès la fin du VIIIe siècle et au cours du IXe siècle, on observe un élargissement inédit des techniques de décors des céramiques glaçurées dont certaines deviendront des « classiques » de la civilisation islamique : c’est le cas des décors dits « cloisonnés » où des lignes peintes non glaçurées viennent cerner des aplats de glaçures colorées. Un de ces grands types de décor, le décor dit de ligne noire, se développe à partir de la fin du XIVe siècle sur des céramiques architecturales au sein d’une région allant de l’Anatolie à l’Inde, en passant par l’Iran et l’Asie Centrale.
On ignore encore beaucoup des caractéristiques techniques de ce décor, de sa genèse et de sa diffusion. Notre objectif à long terme est d’étudier à la fois le versant technique de l’élaboration de ces décors et de leur évolution, mais également les dynamiques politiques, économiques et culturelles responsables des filiations et transferts technologiques qui s’opérèrent au sein du monde islamique du XIVe au XIXe siècle.
Cette étude porte actuellement sur un corpus d’une trentaine de tessons provenant des réserves du Département des Arts de l’Islam du musée du Louvre, et vise à s’étendre à d’autres collections à l’échelle nationale autant qu’internationale. Ainsi, afin de mieux comprendre le processus opératoire de fabrication de ces céramiques glaçurées (stratigraphie des décors, nature de la pâte, des glaçures et de leurs couleurs et du cerne noir, modes de cuisson), des observations ont été menées à la fois à l’échelle macroscopique mais également microscopique (MEB). La méthodologie mise en œuvre a fait appel également à l’analyse chimique par MEB-EDS et l’analyse structurale par diffraction X et micro-spectrométrie Raman.
Ce sont ces premiers résultats, témoins de l’évolution de la technique de la « ligne noire » à travers les siècles et les régions traversées, que nous nous proposons d’exposer.
À l’aide de cette étude, l’idée sera donc de poser des jalons technologiques, décoratifs, chronologiques et géographiques afin de répondre aux questions que l’on se pose sur les dates et les modalités géographiques et humaines des transferts de savoir-faire au sein du monde islamique durant l’époque que nous étudions.