La régulation socio-judiciaire de la sexualité juvénile à Montréal dans le premier XXe siècle - Archive ouverte HAL Accéder directement au contenu
Chapitre D'ouvrage Année : 2010

La régulation socio-judiciaire de la sexualité juvénile à Montréal dans le premier XXe siècle

Résumé

Comment la Cour des jeunes délinquants de Montréal, institution issue du grand mouvement de réforme sociale nord-américain du début du XXesiècle, prend-elle en charge la régulation des déviances sexuelles chez les jeunes garçons et filles, à Montréal, dans la première moitié du XXe siècle ? La sexualité apparaît comme une motivation majeure des réformateurs pour étendre le filet de prise en charge judiciaire de la jeunesse à des situations pré-délinquantes. Ce projet biopolitiquede surveillance des corps juvéniles participe de la nouvelle doxapréventive de gestion des risques sociaux qui anime les politiques sociales comme pénales renouveléesau tournant du siècle.

Cette sexualité irrégulière, qui semble alors mettre en danger la jeune nation canadienne, est d'abord celle des jeunes filles, dont on craint l'émancipation avec le développement du salariat et de la culture urbaine favorisant l'autonomie et la promiscuité sexuelle. La Grande Guerre avive encore cette angoisse, dont le péril vénérien est un point de fixation. Quant aux garçons, dont l'identité de genre est moins explicitement associée aux déviances sexuelles au début du siècle, leurs pratiques font l’objet d’une attention de plus en plus soutenue de la part des acteurs de la justice des mineurs.L'onanisme, toléré comme rituel collectif du groupe enfantin, devient, dans l'entre-deux-guerres, le stigmate d'un trouble nerveux pointé par les nouveaux experts du psychisme juvénile. L’homosexualité masculine, honnie mais ignorée, ne devient un problème social qu’à partir desannées 1940. Ainsi, la question du genre apparaît comme centrale pour décrypter cette modulation de l'intervention judiciaire dans la sphère de l'intime. Autre attribut identitaire, l'âge module la réponse judiciaire, alors que s'esquisse progressivement une reconnaissance de l'autonomie affective des adolescents, à condition que les pratiques de flirtse conforment aux exigences conjointes des familles et de la Cour. La question des loisirs légitimes est alors âprement discutée. Enfin, l'intervention judiciaire pointe également une sexualité subie, tapie dans l'épaisseur des violences familiales. Si l'inceste reste un grand tabou dans un Québec très catholique consacrant aveuglément l'autorité paternelle, l'incrimination des adultes par la Cour des jeunes délinquants dévoile progressivement, avec euphémisme, les violences domestiques dont l’exploitation sexuelle est un des aspects.

Fichier non déposé

Dates et versions

hal-01924862 , version 1 (16-11-2018)

Identifiants

Citer

David Niget, Véronique Blanchard, Régis Revenin, Jean-Jacques Yvorel. La régulation socio-judiciaire de la sexualité juvénile à Montréal dans le premier XXe siècle. Les jeunes & la sexualité : initiations, interdits, identités (XIXe-XXIe siècle), Autrement, pp.87-98, 2010, Mutations / Sexes en tous genres, 978-2746713666. ⟨10.3917/autre.blanc.2010.01.0087⟩. ⟨hal-01924862⟩
108 Consultations
0 Téléchargements

Altmetric

Partager

Gmail Facebook X LinkedIn More