Le Vocabulaire de Giraudoux. Introduction
Résumé
La route de Giraudoux n’a jamais croisé le chemin de Damas, il n’a jamais hésité devant cette borne Michelin qui dirigeait d’un côté les Renan et les Valéry, de l’autre les Péguy et les Claudel. Pas de conversion religieuse chez lui, ni de reconversion scientifique. Du monde antique des humanités au monde moderne des réalités, il glisse sans effort et sans reniement. Sans doute les acquisitions de la curiosité ont quelque peu étoffé le très léger bagage scientifique dont l’école l’avait pourvu. Mais il ne semble pas que Giraudoux ait demandé à la Science la clé de l’univers : l’explication du monde et de ses lois lui paraissait chose trop sérieuse pour être abandonnée aux hommes de science.
Mais Giraudoux qui aimait les jeux de logique où la raison fait la guerre au hasard, eût sans doute apprécié les vertus ludiques du jouet logique qu’est l’ordinateur, jouet sans hasard et sans partenaire, où le jeu élimine tout jeu, tout interstice où se glisseraient le probable, le possible ou l’erreur, jouet intellectuel et presque immatériel inventé par Boole, Babbage ou Turing bien avant que la technologie ne le réalise.
Du moins osons-nous espérer qu’il se fût prêté de bonne grâce à ce jeu, avec cette curiosité et cette ouverture qui lui faisaient priser les jeux du stade comme ceux de l’esprit, et les jeux de société comme ceux de la technique. Lui qu’on a vu si peu effarouché au milieu des canons et des machines de guerre, si vite familier avec la machinerie du théâtre et de la mise en scène, avec les micros, les caméras et tout l’outillage de la radio et du cinéma, eût sans doute été fort à l’aise auprès des machines à calculer.
Origine : Fichiers produits par l'(les) auteur(s)