‘Pluralités linguistiques inégalitaires’ : notion en travail, notion en question
Résumé
Cet article s’inscrit dans le cadre d’une recherche sociolinguistique qui s’intéresse à l’expérience plurilingue en situations de « pluralités linguistiques inégalitaires », quand elle met en contact des langues dotées de statuts dont la disparité leur confère une légitimité inégale, au sein d’un espace social, et peut-être aussi, c’est une question du travail, pour les individus qui en sont locuteurs : En quoi et selon quels enjeux, sociaux, identitaires, la disparité statutaire des langues marque-elle l’expérience plurilingue, l’histoire des relations aux et entre les langues ? Mais dans la perspective qualitative du travail, la formulation du questionnement est délicate pour éviter l’écueil d’une pensée causaliste selon laquelle l’inégalité statutaire, donnée macro-sociolinguistique, pré-inscrirait la relation construite aux langues dans un rapport (exclusif) d’inégalité, dans une logique de langues automatiquement et uniquement perçues comme inégales. La problématique critique soulevée souligne ainsi l’importance et la difficulté, pour le sociolinguiste qualitativiste, de se défaire de logiques quantitatives de pluralités et de différences hiérarchisées, pour se donner la possibilité de concevoir, d’apercevoir et d’analyser des dimensions de différences qualitatives, liées à la diversité des fonctions dont sont socialement et symboliquement investies les langues, de différences perçues, (co-)construites ou déconstruites dans la logique d’enjeux sociaux et identitaires situés.