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Article Dans Une Revue Vertigo Année : 2013

Back in Tulsa (Sur le cinéma de Larry Clark)

Résumé

Au-delà du simple constat historico-sociologique, que peut signifier le privilège accordé depuis déjà quelques temps à la figure de l’adolescent au cinéma ? À quelles (nouvelles) manières d’être et de faire nous renvoie-t-il ou nous introduit-il ? Quelles relations à la vie, la mort, le sexe, l’amour, la politique, etc. modélise-t-il ? Et de la même façon, de quels dénis et illusions ces personnages d’éternels adolescents, qui ne sont plus des adolescents au sens générique, et dont regorgent aujourd’hui le cinéma – notamment français – sont-ils le symptôme ? Un jeune garçon au corps frêle avance dans l’obscurité d’une rue fantomatique. Filmé en contre-jour, il émerge lentement de l’ombre qui dessine progressivement les contours de son visage. Le mouvement incessant de l'adolescent amarré à son skateboard s’accompagne d’un travelling latéral dont le rendu visuel épouse la divagation hypnotique de son corps continuellement en suspension, mouvement qui l'isole du monde. Ce sentiment de liberté est très vite contrarié par l’arrivée d’une voiture de police, symbole de l’autorité qui met fin à l’échappée poétique et au désir d’un ailleurs utopique. Saisie à l’épaule, la caméra retrouve des terres plus solides, ce que confirme la confrontation de l’adolescent à l’adulte. À partir de ces images, premiers plans de son dernier film Marfa Girl (2012), Larry Clark va nouer des interactions et des passages entre les corps : ceux du désir, réel ou fantasmé, contre ceux de l’autorité qui voudrait interdire la conquête des possibles par la jeunesse. Deux extrêmes reliés par l’expérience du toucher qui transforme et matérialise le désir autant qu’il peut l’abimer et condamner sa puissance érotique. Souvenons-nous dans Ken Park (2002) des sévices démesurées reçues par Peaches lorsque son père la surprend au lit avec son ami, exemple radical d’un corps meurtri et vidé de tout plaisir sensuel. L’érotisation de la jeune fille n’étant possible que dans la perspective d’un rituel incestueusement troublant telle la séquence symbolique du mariage. Dans Marfa Girl, le réalisateur capte une danse corporelle dont l’érotisation des postures ne peut masquer la violence d’un climat social conservateur qui détermine les relations entre la communauté latino-américaine et la communauté blanche, entre hommes et femmes, adultes et jeunes. De ces interactions, le film ne cherchera pas à en comprendre ou expliquer les causes, pour s’intéresser au seul désir adolescent, extraire la moelle sensible de cet espace épris d’une idéale pureté. Saut temporel abrupt ou raccord inversé sur l’ouverture de Tulsa (1968), premier film oublié de Larry Clark. Banlieue suburbaine américaine anonyme et semblable à bien d’autres. Tulsa résonne comme une sorte d’abstraction pour la plupart des gens – située quelque part en Oklahoma, à peu près au centre du contient, nom évocateur d’un nul part idéalisé.
Fichier non déposé

Dates et versions

hal-01513611 , version 1 (27-04-2017)

Identifiants

  • HAL Id : hal-01513611 , version 1

Citer

Benjamin Léon. Back in Tulsa (Sur le cinéma de Larry Clark) : Retour sur le premier film de Larry Clark, l'expérimental Tulsa (1968). Vertigo, 2013, L'empire de l'adolescence 45, pp.92-99. ⟨hal-01513611⟩

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