« Contre les murs: la poésie civile de Sergio Raimondi »
Résumé
Les interventions urbaines des Mateístas interrogent la place du poème et du poète dans la ville à la fin du XXe siècle. Si les stratégies et formes de circulation de la parole poétique du groupe, actif à Bahía Blanca, Argentine entre 1985 et 1994, ne sont guère différentes des propositions des avant-gardes (pintadas barriales, distribution des tracts « Matefletos », « Cuernopanzas » ou « Mate Art »…), le positionnement politique, les implications esthétiques et les enjeux sociaux de cette « poétique des quartiers » s’avèrent, dans un contexte d’une post-dictature récente, radicalement différents dans leur militance culturelle.
À la croisée des discours sociaux, historiques, politiques, le groupe s’approprie des espaces publics et des « lieux communs », interdits quelques années plus tôt, pour y rendre visible et lisible un certain malaise face au capitalisme, au discours néolibéral, et aux troubles échanges entre poésie et marché. Ils contestent ainsi une certaine vision de la poésie comme activité élitiste, solitaire ou genre en voie de disparition, et postulent, au contraire, une poésie de résistance: à la fois « action poétique » et puissante dénonciation des méfaits de la modernité, une approche qui nourrit également le travail poétique de Sergio Raimondi dans son recueil Poésie civile, de 2001.